Le Coin de la Conjoncture du 28 juillet 2018
Climat des affaires, toujours sur un palier
Au mois de juillet, le climat des affaires est resté stable pour le troisième mois consécutif. Il demeure à un niveau supérieur à sa moyenne de longue période. Calculé à partir des réponses des chefs d’entreprise des principaux secteurs d’activité marchands, l’indicateur qui le synthétise s’élève à 106. Le climat des affaires est stable dans le bâtiment et les services, gagne un point dans le commerce de détail et en perd un dans l’industrie. Par rapport au mois de mai, il baisse de trois points dans le commerce de gros. Le climat des affaires demeure au-dessus de sa moyenne de longue période dans chaque secteur.
Cependant, le climat de l’emploi se dégrade avec une perte de deux points de l’indicateur qui le synthétise. Il se situe à 108 et retrouve ainsi son niveau de mai, toujours au-dessus de sa moyenne de longue période. Cette baisse résulte surtout du repli du solde d’opinion relatif à l’emploi passé dans les services hors intérim.
Niveau de confiance des ménages en juillet : ni pour, ni contre, bien au contraire
Au mois de juillet, selon l’INSEE, la confiance des ménages dans la situation économique est stable à 97 restant ainsi en-dessous de sa moyenne de long terme (100) pour le troisième mois consécutif.
Les ménages demeurent dubitatifs face à la situation économique. Ils apparaissent plus enclins à épargner qu’à consommer, ce qui se traduit par ailleurs sur des montants relativement élevés de collectes pour l’assurance vie et le Livret A. Le pouvoir d’achat des ménages est élimé par la hausse des prélèvements et par le regain de l’inflation. Il faudra attendre la publication de l’indice de confiance du mois d’août pour apprécier l’effet sur le moral des ménages de la victoire de la France à la coupe du monde de football.
Au mois de juillet, le solde d’opinion des ménages sur leur situation personnelle future est en progrès de 2 points tandis que celui sur leur situation personnelle passée est stable. Les deux soldes se situent au-dessous de leur moyenne de long terme.
En juillet, les ménages considèrent que leur capacité d’épargne future est en hausse. L’indicateur augmente nettement de 7 points après en avoir perdu 4 en juin. Il se situe au-dessus de sa moyenne de longue période. Le solde sur la capacité d’épargne actuelle des ménages est quant à lui inchangé et se maintient légèrement au-dessus de sa moyenne de longue période. La part des ménages estimant qu’il est opportun d’épargner est quasi stable en juillet. Le solde correspondant demeure ainsi nettement au-dessous de sa moyenne de long terme.
En juillet, assez bizarrement, les ménages sont presque aussi nombreux qu’en juin à considérer que le niveau de vie passé en France s’est amélioré au cours des douze derniers mois. En effet, une majorité considère dans le même temps que l’inflation a été plus importante. Comme quoi, les Français restent optimistes pour le long terme, et estiment que leur niveau de vie futur devrait s’améliorer au cours des douze prochains mois. De même, les craintes des ménages concernant l’évolution du chômage diminuent légèrement en juillet (-2 points) après avoir fortement augmenté en juin (+14 points).
Le dollar, indestructible ?
Les tweets du Président des États-Unis, la guerre commerciale que ce dernier a engagée avec la Chine et l’Europe, le possible creusement du déficit et la fin de cycle économique maintes fois annoncée sont censés jouer en défaveur du dollar. Or, depuis l’arrivée au pouvoir de Donald Trump, la monnaie américaine a tendance à s’apprécier par rapport à l’ensemble des monnaies.
Les facteurs traditionnels de dépréciation sont donc, pour le moment, inopérants. Le plein emploi en favorisant la demande intérieure contribue à l’accroissement du déficit commercial. Ce déficit est également alimenté par la politique budgétaire expansionniste de l’exécutif. La dégradation du solde commercial devrait amener logiquement une détérioration du taux de change. Cette année, le déficit commercial pourrait atteindre 600 milliards de dollars. Certes, les mesures protectionnistes pourraient atténuer ce déficit mais leur effet pourrait être inverse à celui recherché car l’élasticité des importations en volume vis-à-vis de leur prix est faible. Même si les prix augmentent en raison de la majoration des droits de douane, les Américains continueront à importer par absence de produits de substitution.
Par son caractère déséquilibré, la politique budgétaire et fiscale devrait provoquer une dépréciation de la devise américaine. Le déficit public devrait être cette année de 5 % du PIB. Les mesures relatives au rapatriement des profits détenus à l’étranger sont transitoires quand la baisse des impôts ne l’est pas. Le déficit et donc la dette publique ne peuvent qu’augmenter.
Le ralentissement de la croissance est attendu à partir de 2019, ce qui pourrait ralentir la politique de normalisation des taux d’intérêt par la banque centrale, politique qui est, par ailleurs, contestée par Donald Trump.
L’appréciation du dollar est liée à la hausse des taux d’intérêt dont la progression est plus vive que prévu. En outre, les autres grandes banques centrales n’ont pas relevé à due concurrence leurs taux directeurs, ce qui conduit à accroître l’écart avec les taux américains. La politique monétaire de la FED a donc comme conséquence d’attirer les capitaux en obligations vers les États-Unis.
Au-delà de son caractère pernicieux à terme, la réforme fiscale contribue à augmenter le volume de capitaux souhaitant s’investir aux États-Unis. La baisse de la taxation des profits, les incitations au rapatriement de profits détenus à l’étranger rendent attrayants le marché des actions américaines. Cet effet devrait s’estomper dans le courant de l’année 2018.
Compte tenu du caractère transitoire des facteurs jouant en faveur de l’appréciation du dollar, celle-ci ne devrait pas perdurer au-delà de 2018. La fin de la politique monétaire non conventionnelle au sein de la zone euro, à partir de 2019, devrait entraîner un ajustement sur le marché des changes. La monnaie européenne devrait se valoriser en raison de l’importance des excédents commerciaux de la croissance et d’une croissance supérieure à celle des États-Unis. Néanmoins, les problèmes internes à l’Union européenne (Brexit, Italie, etc.) pourraient freiner l’appréciation de l’euro.
Brexit, à qui perd, gagne ?
À quelques mois de la clôture des négociations, le Royaume-Uni et l’Union européenne sont dans l’impasse. La Première Ministre Theresa May qui a dû faire face au départ de deux de ses ministres peine à fixer une ligne acceptable pour les différentes composantes de sa majorité constituée d’anti-Brexit, de pro hard-Brexit et de pro soft-Brexit. Vitale pour non seulement pour les entreprises britanniques mais aussi pour de nombreuses entreprises du Continent, la question de l’accord commercial demeure entière. Dans une interview dans le Sunday Telegraph, le nouveau ministre en charge du Brexit, l’eurosceptique Dominic Raab, a indiqué que « le Royaume-Uni ne paiera la facture du divorce avec l’Union européenne qu’à la condition qu’un accord commercial soit trouvé ». Ce chantage au paiement de la soulte de sortie a évidemment créé un froid avec les négociateurs de la Commission de Bruxelles. Cette sortie va à l’encontre des engagements pris par Theresa May vis-à-vis de l’Union européenne. Theresa May avait accepté au mois de décembre dernier, un accord financier d’un montant total de 39-44 milliards d’euros. Le ministre des Finances britannique, Philip Hammond qui défend l’idée d’une solution favorable aux entreprises de son pays a considéré comme inconcevable le fait que Londres n’honore pas ses engagements financiers envers l’Union.
Michel Barnier, le négociateur européen pour le Brexit, a rappelé que l’Union ne fragilisera pas son marché intérieur qui reste la pierre angulaire de la construction européenne. En préalable à un accord global, la Commission exige que des solutions soient trouvées pour l’Irlande. Ce n’est qu’après l’obtention de garanties sur ce point que Bruxelles serait prête à admettre une période transitoire pour les produits britanniques. Pour le moment, Theresa May ne propose qu’une libre circulation des biens entre l’Irlande du Nord et l’Irlande du Sud. Cette proposition ne concerne, en l’état, ni les personnes, ni les services. Or, la Commission demande que la libre circulation s’applique tant pour les produits que pour les services et les personnes.
Dans le cadre d’un jeu de poker menteur, la Commission étudie tous les scénarii dont celui d’un hard-Brexit qui correspondrait à l’absence totale d’accord avec le Royaume-Uni. Selon un tel scénario, les échanges de biens et services des deux ensembles seraient régis par les règles de l’Organisation Mondiale du Commerce, ce qui se traduirait par l’assujettissement de droits de douane relativement importants. L’aéronautique, l’automobile et la finance au Royaume-Uni seraient, fortement pénalisés. Les pays de l’Union européenne et en premier lieu la France, seraient également impactés car le Royaume-Uni est un important importateur de produits industriels et agricoles.
Le Royaume-Uni compte sur les pays d’Europe du Nord ainsi que sur ceux de l’Europe de l’Est comme la Pologne qui lui sont traditionnellement favorables, voire de l’Allemagne, pour assouplir la position de la Commission de Bruxelles. Cette dernière entend que le précédent du Brexit reste unique. En retenant le principe d’un coût élevé de sortie, elle entend dissuader d’autres candidats éventuels à la sortie.
La Commission de Bruxelles entend maintenir d’autant plus la pression que le Gouvernement de Theresa May est en situation de faiblesse. Selon un récent sondage, seuls 16 % des Britanniques approuvent la manière dont la Première Ministre gère la sortie de l’Union Européenne, et 12 % seulement pensent que le plan de Theresa May serait bon pour le Royaume-Uni. La population reste très divisée vis-à-vis de l’Europe. 34 % de la population estime que l’ancien ministre des affaires étrangères Boris Johnson négocierait mieux avec Bruxelles. La moitié des sondés jugent qu’une rupture complète serait meilleure pour le Royaume-Uni quand l’autre moitié souhaite le maintien dans l’Union européenne. Les questions des relations avec l’Union et de l’immigration transcendent les électorats des deux grands partis de gouvernement, le Parti Travailliste et le Parti Conservateur. Leurs électeurs seraient prêts à opter pour un autre parti en fonction des réponses apportées sur ces différents sujets.