Le Coin de la conjoncture – inflation – conjoncture – créativité – numérique
Inflation, la bataille n’est pas totalement gagnée
Le taux d’inflation annuel de la zone euro s’est élevé à 2,6 % en mai contre 2,4 % en avril, selon Eurostat. Un an auparavant, il était de 6,1 %. Le taux d’inflation annuel de l’Union européenne s’est établi à 2,7 % en mai, contre 2,6 % en avril. Un an auparavant, il était de 7,1 %. La décrue de l’inflation marque le pas avec la persistance des hausses de salaires.
Les taux annuels les plus faibles ont été observés en Lettonie (0,0 %), en Finlande (0,4 %) et en Italie (0,8 %). Les taux annuels les plus élevés ont quant à eux été enregistrés en Roumanie (5,8 %), en Belgique (4,9 %) et en Croatie (4,3 %). Par rapport à avril, l’inflation annuelle a baissé dans onze États membres, est restée stable dans deux, et a augmenté dans quatorze autres. La France se situe avec un taux de 2,6 % dans la moyenne européenne.
En mai, les plus fortes contributions au taux d’inflation annuel de la zone euro provenaient des services (+1,83 point de pourcentage, pp), suivis de l’alimentation, alcool & tabac (+0,51 pp), des biens industriels hors énergie (+0,18 pp) et de l’énergie (+0,04 pp).
Cercle de l’Épargne – données Eurostat
Stabilité du climat des affaires en France en juin
Pour le troisième mois consécutif, le climat des affaires en France demeure stable en juin par rapport à mai selon l’INSEE. À 99, l’indicateur qui le synthétise, calculé à partir des réponses des chefs d’entreprise des principaux secteurs d’activité marchands (essentiellement reçues avant le 10 du mois), reste juste au-dessous de sa moyenne de longue période (100).
Cercle de l’Épargne – données INSEE
Dans le commerce de détail (y compris commerce et réparation d’automobiles), le climat des affaires s’améliore légèrement, porté par le rebond du solde d’opinion relatif aux intentions de commandes. Dans l’industrie, le climat des affaires est stable, juste au-dessous de son niveau moyen. Dans les services, le climat des affaires se dégrade légèrement, pénalisé par le recul des soldes d’opinion concernant l’activité, tant récente qu’à venir. Enfin, dans le bâtiment, l’indicateur de climat des affaires se détériore également, en lien avec la dégradation des soldes sur l’activité.
En juin, l’indicateur synthétique de climat de l’emploi se dégrade. À 100, il perd deux points par rapport à mai et retrouve, ainsi, sa moyenne de longue période. Cette détérioration résulte principalement du recul des soldes d’opinion relatifs à l’évolution récente et à venir des effectifs dans les services (hors agences d’intérim).
Les PME françaises se numérisent à grande vitesse !
Selon l’INSEE, la France compte 4,6 millions de TPE (très petites entreprises, moins de 10 salariés) et 160 000 PME (petites et moyennes entreprises, entre 10 et 249 salariés). Ces entreprises constituent un des piliers majeurs de l’économie française employant 46 % des salariés du secteur privé et 36 % du chiffre d’affaires des entreprises. La numérisation représente pour ces entreprises un axe de développement capital. Le manque de compétences, de ressources et de temps constitue un handicap pour la mise en place d’une digitalisation de leurs activités. Depuis 2018, elles peuvent être accompagnées par France Num, initiative gouvernementale pour la transformation numérique des TPE et PME, coordonnée par la Direction générale des entreprises.
Depuis quatre ans, une étude est réalisée par le Crédoc afin de suivre l’évolution de cette numérisation. Selon la dernière étude publiée en mai, plusieurs secteurs comme l’agriculture, les transports, le BTP ou l’agroalimentaire peinent encore à prendre ce virage, tandis que la cybersécurité devient une préoccupation croissante. Plus en pointe, certaines TPE et PME affichent un réel intérêt pour l’intelligence artificielle, l’analyse de données et la sobriété numérique.
La crise sanitaire a conduit les PME et les TPE à renforcer leur présence sur Internet. 84 % d’entre elles en 2023 disposent soit d’un site ou d’une vitrine sur un ou plusieurs réseaux sociaux. En 2020, seulement 37 % des TPE-PME avaient un site ; en 2023, ce taux est passé à 63 %. Pour les seules PME, la France demeure en-deçà la moyenne européenne, 68 % contre 78 %. Elle est loin derrière l’Allemagne (93 %) ou la Finlande (98 %).
Ce taux est plus élevé pour les secteurs des nouvelles technologies, de l’industrie, de l’artisanat et du commerce. À l’opposé, l’agriculture, les transports, le BTP ou l’agroalimentaire sont bien moins présents. Les entreprises absentes d’Internet le justifient principalement par l’absence de bénéfices pour l’activité ou le métier (53 %). Parmi les autres motifs figurent les difficultés financières (19 %), un retour sur investissement jugé trop limité et la contrainte de la mise à jour.
35 % des TPE et PME se déclarent actives sur les réseaux sociaux afin de développer leur visibilité, leur notoriété de l’entreprise et acquérir de nouveaux clients.
Au-delà de la seule visibilité sur Internet, la transformation numérique est un enjeu de compétitivité de mieux en mieux compris par les TPE et PME. Les trois quarts (76 %) d’entre elles pensent, en 2023, que la présence en ligne représente un bénéfice réel. Cette proportion était de 68 % avant la crise sanitaire. Ce constat d’une image positive du numérique pour l’entreprise est plus marqué dans les secteurs des nouvelles technologies (95 %), de la finance/assurance (84 %) ainsi que des services à la personne (83 %). Pour ce dernier secteur, les entreprises ont rendu davantage visible leur offre en créant un site, en prospectant par messagerie (@mailing) et en utilisant des logiciels dédiés à la facturation et à la relation client.
74 % des dirigeants estiment que les actions de digitalisation mises en œuvre leur ont permis de faciliter la communication avec leurs clients et 59 % avec leurs collaborateurs. Un sur deux déclare également faire des économies : moins d’impressions, d’envois postaux, diminution des coûts de stockage… En 2022, 37 % des chefs d’entreprise indiquaient que le numérique leur permettait de gagner de l’argent, ce taux est passé à 39 % en 2023. Une entreprise sur deux (51 %) capte désormais au moins 5 % de ses clients en ligne. Ce chiffre en forte hausse (+8 points par rapport à 2023) varie selon les secteurs : l’hébergement et la restauration (79 %) et les services à la personne (68 %) sont largement au-dessus, tandis que le transport et la logistique, l’agriculture et l’industrie agroalimentaire sont moins nombreux à trouver des clients sur Internet.
L’intelligence artificielle se diffuse également au sein des TPE et des PME. Cette technologie permet d’optimiser leurs activités, d’améliorer l’expérience client ou encore de réduire leurs coûts. En 2023, néanmoins, il n’y a que 5 % des TPE et des PME qui utilisent des solutions d’intelligence artificielle.
Les solutions d’analyse de données apparaissent de plus en plus accessibles, 11 % des TPE et des PME y ont recours. Cette proportion s’élève à 16 % dans les TPE et PME du commerce.
La cybersécurité est un enjeu majeur pour les TPE et PME. 48 % d’entre-elles ont été victimes d’au moins une attaque en 2023, soit +12 points par rapport à 2020. Les attaques sont de nature multiple : phishing, « wifi hacking », rançongiciel, usurpation d’adresse IP, logiciel malveillant, fraude au président, etc.
Déficits publics, la France dans l’œil du cyclone
Après la publication de rapports sans appel de la Cour des Comptes, après la dégradation de la note relative à la dette publique par l’agence S&P, la France fait l’objet, depuis le mercredi 19 juin, d’une procédure pour déficit excessif par la Commission de l’Union européenne.
La Commission européenne a ouvert la voie à des procédures dites « pour déficits publics excessifs » contre sept États membres de l’Union européenne : l’Italie, la Belgique, la Hongrie, la Pologne, la Slovaquie, Malte et la France. L’an dernier, les déficits les plus élevés de l’Union ont été enregistrés en Italie (7,4 % du PIB), en Hongrie (6,7 %), en Roumanie (6,6 %), en France (5,5 %) et en Pologne (5,1 %). La dette de la France est actuellement supérieure à 110 % de son PIB, celle de l’Espagne s’en approche, alors que celle de l’Allemagne n’atteint que 64 %. Le placement de la France sous procédure pour déficit excessif était donc inévitable. La multiplication des promesses électorales ne peut que renforcer les craintes de la Commission d’un emballement de la situation budgétaire française.
Les États européens concernés par la procédure de déficit excessif devront prendre des mesures correctrices afin de revenir progressivement sous la barre de 3 % du PIB, sous peine de sanctions financières qui peuvent atteindre 0,1 % du PIB par an, soit près de 2,5 milliards d’euros dans le cas de la France. La Commission pourrait prélever ces sommes sur les fonds du plan de relance européen ou les fonds de cohésion.
En avril dernier, est entré en vigueur un pacte de stabilité « rénové » qui accorde plus de flexibilité aux États dans l’élaboration de leurs trajectoires budgétaires, sur le fondement de la soutenabilité de leur dette. Selon le nouveau pacte, les pays en déficit excessif doivent réduire au minimum leur déficit de 0,5 point par an. Ce ratio automatique a été critiqué par de nombreux eurodéputés pour son effet restrictif sur une activité économique déjà atone, la Commission n’attendant pas plus de 1 % de croissance dans l’Union cette année.
La Commission européenne a proposé aux États membres des trajectoires budgétaires de référence, sur quatre ans ou plus longtemps, offrant la possibilité d’un étalement des ajustements jusqu’à sept ans. En s’appuyant sur ces trajectoires, les ministères des Finances doivent travailler tout l’été et renvoyer à Bruxelles d’ici la fin septembre leurs plans budgétaires pluriannuels. La Commission donnera, en novembre, ses recommandations pour le rétablissement des comptes publics. Les trajectoires finales doivent être validées par le Conseil Ecofin en décembre.
De son côté, la Banque centrale européenne (BCE) a averti, mercredi 19 juin, que les gouvernements en zone euro doivent améliorer « immédiatement » leurs finances publiques face aux risques de long terme liés au vieillissement démographique, à l’augmentation des dépenses de défense, au dérèglement climatique et au numérique.
Concernant la France, après la Cour des Comptes, la Commission des Comptes, réunie à Bercy, a alerté sur la dérive des comptes sociaux. Selon cette commission, le déficit attendu en 2024 serait bien plus important qu’initialement prévu. Alors que la loi de financement de la Sécurité sociale, adoptée à l’automne, avait retenu un déficit de 10,5 milliards, il pourrait atteindre 16,6 milliards d’euros. Cette dérive est imputable à des moins-values de recettes fiscales et sociales. La hausse de la masse salariale sur laquelle sont assises les cotisations s’élèverait à 3,1 % cette année (au lieu des +3,9 % initialement prévus). Les dépenses ont continué également à progresser de manière dynamique notamment en lien avec l’inflation, étant donné que les pouvoirs publics ont fait le choix de l’indexation. Le dérapage du déficit de la Sécurité sociale en cours d’exercice s’explique aussi par un effet base. Celui de 2023 (y compris le fonds de solidarité vieillesse) s’étant révélé plus important que prévu, 10,8 milliards d’euros au lieu de 8,7 milliards, l’exercice 2024 a démarré sur des bases plus dégradées qu’attendu. Au sein du régime général de la Sécurité sociale, la branche maladie enregistre la plus forte dégradation, avec un déficit attendu à 11,4 milliards cette année. La branche vieillesse (régime de base du privé) connait également une aggravation de son déficit de 1,3 milliard d’euros, celui-ci passant ainsi à 5,5 milliards d’euros. Les économies générées par le passage à 64 ans de l’âge légal de départ à la retraite n’interviendront que progressivement et seront réellement effectives qu’en 2030. Après avoir été longtemps excédentaire, le régime de retraite des collectivités territoriales (CNRACL) connaît, depuis 2018, un déficit continu. En 2024, il atteindrait 3,6 milliards, après 2,5 milliards en 2023. Selon les prévisions du Conseil d’orientation des retraites, il pourrait atteindre environ 10 milliards en 2030. Les difficultés de ce régime sont liées à l’augmentation du nombre de départs en retraite, tandis que celui des nouveaux affiliés stagne voire diminue. Les pouvoirs espéraient contenir le déficit de la Sécurité sociale à 17 milliards d’euros en 2027, or ce montant risque d’être atteint dès cette année, rendant obligatoire la mise en place d’un plan de rigueur bien plus tôt que prévu.
L’esprit de créativité des élèves mesuré par l’OCDE
Pour la première fois, le Programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA) de l’OCDE a mesuré les compétences des élèves âgés de 15 ans en réflexion créative, en évaluant leur capacité à s’engager de manière productive dans la génération d’idées, à les évaluer et à les enrichir. La créativité constitue en effet un atout dans de nombreuses professions, notamment dans les secteurs qui exigent un haut niveau de qualification. Avec les progrès de l’intelligence artificielle et de la transformation numérique, l’innovation, la créativité et la pensée critique prennent le pas sur les compétences classiques, plus susceptibles d’être automatisées.
Les résultats montrent que certains élèves excellent en pensée créative sans pour autant être particulièrement brillants dans les matières scolaires classiques. Les élèves issus de milieux défavorisés obtiennent, sans surprise, des résultats nettement inférieurs à ceux des élèves plus aisés en pensée créative. Les élèves provenant de milieux difficiles font face à des problèmes tels que l’insécurité alimentaire, le mal-logement ou ont d’importantes responsabilités familiales qui accaparent leur temps et leur énergie, laissant peu de place à des activités créatives.
Selon l’enquête de l’OCDE sur les compétences sociales et émotionnelles de 2023, les jeunes de 15 ans ont tendance à être moins créatifs et à moins bien se connaître que ceux âgés de 10 ans. Les psychologues du développement expliquent en partie cette régression par le passage à l’adolescence, mais l’ampleur des disparités à cet égard entre les pays suggère que l’éducation et l’environnement ont également un rôle à jouer dans ce domaine. Dès la naissance, les enfants ont une créativité débordante, ils veulent apprendre, désapprendre et réapprendre sans cesse, mais l’école valorise davantage la conformité et récompense les élèves qui se plient aux normes de pensée de l’époque plutôt que ceux qui chercher à les remettre en question. Si la performance scolaire et la performance créative peuvent se renforcer mutuellement, l’une ne requiert pas forcément l’autre. En effet, certains systèmes d’éducation comme celui de Singapour, de la Corée et du Canada sont parmi les plus performants en termes de créativité de même qu’en mathématiques, en compréhension de l’écrit et en sciences, quatre autres systèmes ayant obtenu de très bons résultats au PISA – Hong Kong (Chine), Macao (Chine), Taipei chinois et la Tchéquie – se classent en-deçà ou au niveau de la moyenne de l’OCDE dans le domaine de la pensée créative. La France se classe dans la moyenne des pays de l’OCDE.
Les systèmes d’éducation de Singapour, Corée, du Canada, de la Nouvelle-Zélande, de l’Estonie et de la Finlande (par ordre décroissant) obtiennent les meilleurs résultats en termes de pensée créative, avec un score moyen par élève de 36 points ou plus, ce qui est nettement supérieur à la moyenne de l’OCDE (33 points). Les élèves de Singapour obtiennent en moyenne 41 points en pensée créative. La France avec un score de 32 se classe juste au-dessus de la moyenne européenne. Elle est devancée par l’Allemagne, l’Espagne, le Portugal, les États d’Europe du Nord ainsi que par les Pays baltes.
Un écart de performance de 28 points sépare le pays le plus performant du pays le moins performant en matière de pensée créative, équivalant à environ 4 niveaux de compétence. Ainsi, 97 élèves sur 100 dans les 5 pays les plus performants obtiennent une note supérieure à la moyenne des élèves des 5 pays les moins performants (Albanie, Philippines, Ouzbékistan, Maroc et République dominicaine).
Dans les pays de l’OCDE, près d’un élève sur deux, en moyenne, est capable de proposer des idées originales et variées dans le cadre d’exercices simples faisant appel à l’imagination, ou de résolution de problèmes ordinaires (niveau de compétences 4). À Singapour, en Corée et au Canada, plus de 70 % des élèves affichent des résultats de niveau 4 ou plus. En outre, à Singapour, en Lettonie en Corée, au Danemark, en Estonie, au Canada et en Australie, plus de 88 % des élèves atteignent le niveau de base en pensée créative (niveau de compétences 3), ce qui démontre leur capacité à mobiliser des idées pertinentes pour un ensemble de tâches et à proposer des idées originales pour résoudre des problèmes ordinaires (la moyenne de l’OCDE s’établissant à 78 %). Dans les 20 pays et économies les moins performants, moins de 50 % des élèves ont atteint ce niveau de base.
La plupart des pays et économies affichant un score supérieur à la moyenne de l’OCDE en pensée créative ont également des résultats supérieurs à la moyenne en mathématiques, en compréhension de l’écrit et en sciences. Seul le Portugal affiche un score supérieur à la moyenne de l’OCDE en pensée créative (34 points), alors qu’il se situe de la moyenne dans les trois domaines classiques du PISA. Hong Kong (Chine), Macao (Chine), le Taipei chinois et la Tchéquie obtiennent un score égal ou inférieur à la moyenne de l’OCDE en matière de pensée créative, en dépit de résultats supérieurs à la moyenne en mathématiques, en compréhension de l’écrit et en sciences. Dans aucun pays ni économie, les garçons ne se sont montrés plus créatifs que les filles, avec un écart de score de 3 points en moyenne dans l’OCDE. Cet écart entre les genres est significatif dans tous les pays et économies après contrôle des résultats des élèves en mathématiques, et dans la moitié environ des pays et économies après contrôle de leurs performances en compréhension de l’écrit. Les élèves issus d’un milieu socio-économique plus favorisé se sont aussi montrés plus créatifs, obtenant en moyenne 9,5 points de plus que leurs pairs défavorisés dans les pays de l’OCDE.