Le Coin de l’Economie – transition énergétique – consommation – Etats-Unis – immobilier – endettement
Comment financer la transition énergétique ?
Les besoins de financement de la transition énergétique pour aboutir à la neutralité carbone d’ici le milieu du siècle se chiffrent, chaque année, en centaines de milliards d’euros pour les pays la zone euro. À cette fin, l’idée d’une réallocation de l’épargne est mise en avant en oubliant, bien souvent, que cette dernière est déjà utilisée pour financer d’autres actions. À défaut d’augmenter l’épargne et donc de restreindre la consommation, la réorienter vers la lutte contre le réchauffement climatique se fera nécessairement au détriment d’autres projets, ce qui pourrait induire des effets économiques multiples.
Les investissements en zone euro en faveur de la transition énergétique devraient mobiliser 3 points de PIB chaque année d’ici 2050. La zone euro peut compter sur un taux d’épargne des ménages élevé. Celui-ci s’élevait en 2022 à 14 % du revenu disponible brut. Il peut atteindre plus de 18 % en France ou en Allemagne. Avec le vieillissement de la population et la succession rapide des crises, il a une tendance naturelle à augmenter. Dans les années 2010, le taux d’épargne moyen au sein de la zone euro était de 12,5 % du revenu disponible brut.
Pour faciliter l’orientation de l’épargne vers des placements contribuant à la transition énergétique, en 2018, la Commission européenne a adopté un premier plan d’action pour la finance durable. Ce plan a deux priorités : intégrer la durabilité dans la gestion des risques et favoriser la transparence et une vision long terme.
En reprenant ces objectifs, la Commission a établi un règlement de « taxonomie » qui fixe un cadre commun aux entreprises financières et non financières membres l’Union européenne, afin de partager une même définition de la durabilité, et de lutter contre les pratiques d’écoblanchiment (connu sous le nom de « greenwashing »). Le règlement européen sur la transparence financière (SFDR) a ainsi institué un classement en fonction des déclarations des gestionnaires des labels qui certifient les fonds. Trois catégories de fonds ou placements sont distingués :
- les placements dits « Article 8 » qui déclarent la prise en compte de critères sociaux et/ou environnementaux ;
- les placements dits « Article 9 » qui présentent un objectif d’investissement durable, à savoir un investissement dans une activité économique qui contribue à un objectif environnemental ou social, sans causer de préjudice significatif à d’autres objectifs environnementaux ou sociaux, et dans une entreprise qui applique de bonnes pratiques de gouvernance ;
- les placements dits « Article 6 », concernent, par élimination, tous les autres placements (qui ne sont donc ni « Article 8 » ni « Article 9 »).
Les fonds Article 8 et Article 9 représentaient près de 5 000 milliards d’euros d’actifs sous gestion au sein de la zone euro au début de l’année 2023, contre 2 200 en 2021. Cette méthode n’est pas exempte de critiques. Le SFDR donne lieu à plusieurs critiques car il laisse une large place à l’interprétation des gestionnaires d’actifs et ne définit pas, de manière précise, la notion d’investissement durable. En raison des nombreuses incertitudes liées à ce règlement, les gestionnaires d’actifs ont déclassé des fonds de l’article 9 pour les placer en article 8. Le montant global des encours « article 9 » a diminué, en France, de 40 % au quatrième trimestre 2022. En France, afin d’améliorer la situation et de faciliter le classement, l’Autorité des marchés financiers propose que la Commission européenne introduise des critères minimaux sur les conséquences des placements sur l’environnement. Le régulateur français propose également qu’une proportion minimale des actifs en portefeuille pour les fonds classés « article 9 » soit en phase avec la taxonomie européenne. Les investissements des fonds sous « article 9 » devraient réellement être affectés à l’atténuation et à l’adaptation au changement climatique. Enfin les acteurs financiers qui gèrent des fonds classés articles 8 et 9 devraient adopter une approche ESG (économique, sociale et de gouvernance). L’AMF propose enfin d’exclure des fonds article 9 « les investissements dans les activités du secteur des combustibles fossiles qui ne sont pas alignées avec la taxonomie européenne » et de les tolérer dans les produits article 8, à condition de justifier une démarche de transition.
Les pouvoirs publics entendent également favoriser l’épargne verte en ayant recours à des incitations fiscales (plan avenir climat avec la création d’un nouveau produit d’épargne destiné aux jeunes, crédits d’impôts, etc.). La politique monétaire est également mise à contribution avec les émissions d’obligations vertes.
Ce fléchage de l’épargne vers le financement des investissements de transition aboutira à une hausse du montant de l’épargne « verte ». Sans augmentation du montant global de l’épargne, des arbitrages avec d’autres emplois seront réalisés d’autant plus que le niveau élevé de l’endettement des entreprises limite les capacités d’investissement.
La transition énergétique pourrait avoir comme conséquence la baisse d’autres investissements, en particulier ceux visant à accroître la production ou la compétitivité (digitalisation, robotisation). Les investissements en logement pourraient être également pénalisés. La réorientation de l’épargne devrait donc avoir un effet négatif sur la croissance à court terme. Les investissements liés à la décarbonation peuvent même aboutir à une dégradation de la compétitivité en renchérissant les process de production.
Face aux problèmes de financement, les gouvernements pourraient être tentés d’imposer une épargne forcée aux ménages mais au prix d’une moindre consommation qui pénaliserait la croissance. Ils pourraient faire appel à l’épargne internationale mais comme tous les pays ou presque se sont engagés dans une décarbonation de l’économie, les besoins en capitaux sont mondiaux. Si pendant des années, la zone euro a pu compter sur ses excédents au niveau de la balance des paiements courants comme source d’épargne, ce n’est plus le cas depuis le début de la guerre en Ukraine. Une autre voie pour le financement de la transition énergétique serait celle de la création monétaire directe avec un risque d’inflation.
La reprise des prix de l’immobilier aux États-Unis, une mauvaise nouvelle ?
Après avoir subi une forte baisse au cours du second semestre 2022 en lien avec la hausse des taux d’intérêt, les prix de l’immobilier remontent depuis quelques mois. Si cette évolution constitue une bonne nouvelle pour le secteur de l’immobilier, elle est néanmoins le signe que les tensions inflationnistes demeurent vives au sein de l’économie américaine.
Depuis le début de l’année 2023, plusieurs indicateurs semblent prouver un retournement sur le marché immobilier résidentiel aux États-Unis. Les mises en chantier sont passées de 1,4 million fin 2022 à 1,6 millions au cours du premier semestre 2023. Elles avaient atteint un record absolu à 1,8 million en 2021, sachant qu’elles évoluaient autour de 1,3 million durant les années 2010. Les ventes de maisons neuves qui avaient atteint un sommet en 2020, plus d’un million, avaient connu une forte baisse en 2021 pour tomber à 600 000 en rythme annuel dans le courant de l’année 2022. Depuis, elles sont remontées à plus de 750 000. Le redressement des prix de l’immobilier résidentiel est assez marqué depuis six mois avec une hausse de 4 % après avoir enregistré une baisse de 8 % entre 2021 et 2022. Le prix des maisons est, aux États-Unis, deux fois plus élevé en 2023 qu’en 2013, la progression ayant été forte entre 2018 et 2021.
Aux États-Unis, une grande partie de l’inflation provient de la hausse des loyers (effectifs et imputés aux propriétaires de leur logement), qui a un poids important dans les indices de prix. Celle-ci expliquerait un tiers de la hausse de l’indice des prix. Ce ratio atteint plus de 45 % pour le taux d’inflation sous-jacente (hors énergie et alimentation). Au cours du premier semestre 2023, les loyers augmentent de 8 % par an, alors que l’inflation hors énergie, alimentation et loyers n’est plus que de 2,5 % par an. Aux États-Unis, les loyers sont, en règle générale, bien corrélés avec les prix de l’immobilier résidentiel, avec plus d’un an de retard. Le retournement des prix de l’immobilier sur le marché résidentiel pourrait donc se traduire par une nouvelle hausse des loyers. L’inflation qui a légèrement diminué pourrait se redresser. Elle est passée de plus de 6 % en fin d’année 2022 à 5 % au cours du premier semestre 2023.
La Réserve fédérale suit avec attention l’évolution des prix de l’immobilier résidentiel. Malgré une augmentation rapide et forte des taux d’intérêt, leur remontée est une source d’inquiétude et justifie les annonces de la poursuite du programme de relèvement des taux directeurs qui dépassent désormais 5 %. L’augmentation des prix de l’immobilier est liée à une forte demande, en particulier au sein des États qui bénéficient de l’arrivée de nouveaux habitants (Floride par exemple). Avec le développement du télétravail, les Américains recherchent des logements plus larges et plus proches de la nature. La bonne tenue des salaires permet, par ailleurs, de supporter des hausses de loyers et des prix des logements.
Les États-Unis en proie à un manque d’épargne ?
Depuis de nombreuses décennies, en raison d’un déficit commercial abyssal et d’un important déficit public, les États-Unis s’endettent auprès du reste du Monde avec comme conséquence une dette extérieure nette importante. Ce double déficit a permis, dans le passé, de maintenir un haut niveau de consommation au détriment de l’investissement.
Le passage à une situation mondiale d’insuffisance d’épargne face aux besoins d’investissement de la transition énergétique, pour protéger la biodiversité, gérer les ressources en eau, etc., va rendre ce comportement des États-Unis très inefficace et très dommageable. Il ne faudrait plus que les États-Unis consomment l’épargne du Monde. Cette dernière devrait être davantage consacrée à l’investissement, en particulier dans la transition énergétique.
Depuis les années 1990, la balance courante des États-Unis est structurellement déficitaire. Le déficit se situe entre -6 et -3 % du PIB. Si la situation extérieure des États-Unis était équilibrée en 1990, la dette extérieure atteint, en 2023, plus de 60 % du PIB.
Cette dette extérieure est avant tout la traduction d’un maintien d’un fort niveau de consommation. Le taux d’investissement des entreprises américaines a décliné entre les années 2000 et les années 2020. À l’exception de la période covid, le taux d’épargne des ménages est faible et a tendance à baisser. Il était de 9 % du revenu disponible brut en 1990 et ne dépassait pas 5 % au début de l’année 2023. Malgré un taux d’investissement relativement faible, celui-ci excède le taux national d’épargne de deux points de PIB. Les États-Unis font appel à l’épargne extérieure pour combler leurs déficits. Les excédents du monde entier et en particulier, les excédents allemands ont longtemps été recyclés Outre-Atlantique.
Dans les prochaines décennies, l’ensemble des pays devront investir davantage pour la transition énergétique. Les capacités d’épargne excédentaires devraient se réduire. En Europe, une partie de ces capacités seront également affectées à l’effort de défense. En Chine, les autorités devraient moins facilement accepter le financement de l’économie américaine que dans le passé. Les Pays du Golfe devraient également moins investir en-dehors de leurs frontières car ils auront besoin de capitaux en quantité pour préparer leur économie à l’après-pétrole. Les pays émergents qui sont désormais les principaux émetteurs de gaz à effet de serre devront consentir des efforts d’investissement importants pour décarboner leurs activités.
Dans cette perspective, les États-Unis pourraient souffrir d’un manque de capitaux dans les prochaines années, ce qui les obligerait à rééquilibrer leur balance des paiements courants et à réduire leur déficit budgétaire. Les ménages pourraient être appelés à moins consommer et à épargner davantage, constituant un changement de modèle pour les Américains.
Un taux d’endettement acceptable existe-t-il ?
La crise des subprimes a conduit à une forte progression de l’endettement public au sein de l’OCDE, les États étant appelés à venir en aide au secteur financier et à soutenir l’activité. L’épidémie de covid s’est accompagnée d’une nouvelle progression de la dette publique. Cet accroissement, sans précédent, en période de paix a été facilité, voire encouragé par la politique monétaire accommodante des banques centrales. La faiblesse des taux d’intérêt a réduit à son strict minimum le coût de l’endettement au point que des économistes ont théorisé l’idée que les États pouvaient augmenter presque sans limite leurs dépenses (théorie de la nouvelle politique monétaire). Cette période s’est achevée avec la résurgence de l’inflation intervenue après la crise covid et amplifiée par la guerre en Ukraine. La hausse des taux d’intérêt pose le problème de la soutenabilité des dettes publiques et de leur juste niveau.
La mise en œuvre de politiques monétaires dites non conventionnelles aux États-Unis – dès 2010 et en zone euro à compter de 2015 – a provoqué une forte hausse des taux d’endettement public. Il est passé, de 2010 à 2022, de 70 à près de 120 % du PIB aux États-Unis et de 70 à 95 % du PIB au sein de la zone euro. Cette augmentation était jugée vertueux car les taux d’intérêt réels à dix ans étaient alors inférieurs aux taux de croissance du PIB. L’écart a atteint deux points aux États-Unis entre 2010 et 2021. En Allemagne, comme en France, les États ont pu s’endetter à taux nominal négatif, c’est-à-dire que leurs remboursements étaient inférieurs aux montants empruntés. En termes réels, le taux a pu atteindre -3 %. Avant le déclenchement de l’épidémie de covid, il était communément admis que les États devaient profiter de cette situation pour accroître leurs dépenses car la création monétaire induite ne générait pas d’inflation. Dans les faits, celle-ci existait mais se logeait dans la valeur de certains actifs, immobilier ou actions.
La période de taux extrêmement bas a certainement pris fin au-delà même de l’épisode inflationniste en cours. Plusieurs facteurs structurels conduisent à des taux plus élevés. Les besoins d’investissement sont en forte hausse avec la transition énergétique qui nécessite la réalisation de nouvelles infrastructures et la rénovation de nombreux bâtiments. Le vieillissement de la population est par nature inflationniste et devrait provoquer une baisse de l’épargne. Les pénuries de main-d’œuvre devraient amener une hausse des salaires contribuant à un regain d’inflation. Les retraités sont par ailleurs des consommateurs de services à la personne qui sont traditionnellement inflationnistes. Ces derniers seront également amenés à utiliser leur épargne pour maintenir leur niveau de vie.
Les tensions inflationnistes qui pourraient perdurer devraient également amener les banques centrales à maintenir des politiques monétaires moins accommodantes que dans le passé. L’inflation sous-jacente (hors prix de l’énergie et de l’alimentation) tarde à ce titre à diminuer. Les investisseurs commencent à anticiper des taux d’intérêt plus élevés. Les taux d’intérêt réels à 10 ans sur les emprunts d’État (déflatés par le swap d’inflation à 10 ans) sont passés en zone euro de -2 à 1 % de 2022 à 2023 et de -1 à 1,5 % aux États-Unis.
Les États sont confrontés à une demande de dépenses publiques en forte hausse depuis quelques années. La santé, la retraite, la dépendance, la transition énergétique, la sécurité, la défense et l’éducation sont autant de postes de dépenses en forte croissance.
Face à un équilibre plus tendu entre épargne et investissement, les taux d’intérêt ne peuvent qu’augmenter. En zone euro, le taux d’épargne national (ensemble des agents économiques) augmente quand il tend à baisser aux États-Unis. Il est passé de 23,5 à 26 % du PIB de 1998 à 2022 en zone euro et de 21,8 à 19 % aux États-Unis. Les États doivent également faire face à des besoins d’investissement en hausse de la part des entreprises appelées à se décarboner et à se digitaliser. Tout concourt donc à une hausse des taux d’intérêt.
Si le niveau des taux d’intérêt réels à long terme revient à celui observé de 2002 à 2007, le niveau d’endettement actuel n’est pas optimal et nécessite d’être abaissé d’autant plus que la croissance potentielle tend à s’affaiblir avec la disparition des gains de productivité et la stagnation voire la baisse de la population active. Le niveau optimal de la dette dépend de la charge des intérêts qui, si elle est élevée, exige d’avoir un excédent budgétaire primaire (solde budgétaire avant paiement des intérêts) important. Le service de la dette publique est passé, de 1998 à 2020 de 5,2 % à 3,8 % du PIB aux États-Unis et de 4,5 à 1,7 % en zone euro. Il est remonté, en 2023, à 4,1 % aux États-Unis et à 1,8 % en zone euro.
Face à des besoins publics croissants et une hausse des taux d’intérêt, les États seront amenés à réaliser des arbitrages au niveau de leurs dépenses, à augmenter les prélèvements ou à inciter les ménages à investir. Un effet d’éviction pourrait également se produire au détriment des entreprises qui seront également en quête de ressources financières pour leurs investissements.
Consommation, épargne, investissement et transition énergétique
Les gouvernements des pays de l’OCDE doivent faire face à un dilemme, réduire la consommation au profit de l’épargne afin de favoriser l’investissement et la transition énergétique ou sauver la consommation pour maintenir la croissance à un niveau acceptable au prix d’émissions de gaz à effet de serre plus élevées.
Le besoin d’investissement supplémentaire, tant public que privé, devrait augmenter dans les prochaines années avec la transition énergétique et les relocalisations industrielles. La première suppose la réalisation d’infrastructures de production d’énergies renouvelables et de stockage ainsi que l’adaptation de l’ensemble de l’économie à l’objectif de neutralité carbone. Les relocalisations passent par la construction de nouvelles usines sur le territoire des pays occidentaux. Le taux d’investissement qui était étale depuis une dizaine d’années au sein de l’OCDE autour de 22 % du PIB devrait sensiblement remonter. L’investissement a stagné depuis le début du XXIe siècle quand il avait progressé fortement au sein des pays émergents, passant de 25 à 34 % du PIB. L’investissement public avait décliné au sein de l’OCDE de 2002 à 2016 passant de 3,9 à 3,2 % du PIB quand celui des pays émergents restait stable autour de 3,8 % du PIB. Le taux d’investissement des entreprises était, au sein de l’OCDE, stable à 13 % du PIB de 2011 à 2018 avant de remonter légèrement à 13,5 % du PIB en 2022.
Depuis les années 1970, les gouvernements ont privilégié la consommation au détriment de l’investissement. Les plans de soutien mis en œuvre durant la crise sanitaire et depuis le début la guerre en Ukraine en sont de nouvelles preuves. Avec la succession rapide des crises, l’idée d’une politique de maintien du pouvoir d’achat des ménages s’est progressivement imposée. Les transferts sociaux se sont fortement amplifiés passant, au sein de l’OCDE, de 12 à 18 % du PIB de 1980 à 2022. En France, les dépenses sociales représentent plus du tiers du PIB. La progression des dépenses publiques de soutien aux ménages est concomitante à la baisse de celles destinées à l’investissement.
La transition énergétique exige des investissements. Elle pourrait également provoquer des pertes de pouvoir d’achat pour les ménages. Les énergies renouvelables coûtent, pour le moment, plus chères que les énergies carbonées. La réalisation d’infrastructures qui n’est pas dictée par l’obtention rapide de gains de productivité est susceptible de peser sur la croissance et donc sur l’évolution des rémunérations du travail. Les gouvernements seront appelés à compenser les effets de cette transition en particulier pour les plus modestes. La tentation sera d’augmenter les prélèvements obligatoires ou de favoriser une réorientation de l’épargne. La création de de nouveaux produits d’épargne ciblés sur la transition énergétique est une voie possible. La France a décidé ainsi l’instauration d’un livret climat avenir destiné aux mineurs. Avec la taxonomie, les gestionnaires d’actifs seront incités à développer les fonds contribuant à la décarbonation des activités. L’encours des fonds articles 8 et 9 représentait, fin 2022, 2 500 milliards de dollars aux États-Unis et 2 000 milliards d’euros en zone euro, contre respectivement 120 et 40 milliards en 2020. Les gouvernements pourraient également recourir à des systèmes de bonifications d’intérêt pour les crédits visant à réaliser des équipements conformes aux objectifs de développement durable.
Quoi qu’il en soit, la consommation devrait pâtir des choix qui seront effectués par les pouvoirs publics. Sa stagnation voire sa diminution seraient souhaitables du point du vue des émissions de gaz à effet de serre mais elles seraient synonymes d’attrition, de décroissance avec, à la clef, des risques sociaux non négligeables. La remise en cause du modèle de croissance des cent dernières années est susceptible de générer des inégalités sociales entre ceux qui pourront continuer à consommer comme avant et ceux qui ne le pourront plus en raison des augmentations de prix. Pour accélérer la transition énergétique, la recherche d’une croissance plus forte que celle des vingt dernières années est nécessaire, croissance qui évidemment devrait tenir compte des impératifs climatiques. Les gouvernements devront ainsi en permanence tenir compte d’objectifs contradictoires et d’une population de plus en plus divisée.