Le Coin des Tendances
L’Île-de-France fait-elle le bonheur et le malheur des régions limitrophes ?
Au moment du redécoupage des régions durant le quinquennat de François Hollande, la décision fut prise de ne pas remettre en cause les frontières des régions existantes. Le choix fut de fusionner plusieurs régions entre-elles. L’Île-de-France dont le poids au sein de l’économie nationale est sans comparaison avec les autres régions a conservé ses anciennes frontières mais sa sphère d’influence dépasse de loin son territoire. De nombreux départements et villes se situant dans un rayon de 150 à 200 kilomètres sont dépendants de l’Île-de-France. À la différence d’autres métropoles, les relations entre les franciliens et leurs voisins sont en sens unique, de la périphérie vers le centre. Ce déséquilibre est lié à la puissance de la région parisienne et à la faiblesse des grandes villes se situant dans sa périphérie.
Une domination sans partage
L’Île-de-France compte plus de 12 millions d’habitants soit près de 20 % de la population métropolitaine. C’est plus de sept fois plus que les agglomérations de Marseille ou de Lyon. C’est plus de douze fois plus que l’agglomération de Lille. Le PIB de la région parisienne représente plus de 31 % de celui de la France. La région compte 6,5 millions d’emplois salariés et non-salariés, soit 23 % de l’ensemble des emplois en France. Pour le seul emploi salarié marchand, le ratio est de 26 %.
Dans tous les domaines, cette région exerce une prédominance que ce soit pour l’agriculture, l’industrie, les services et notamment en matière de recherche. L’Île-de-France est le premier bassin d’emploi européen. Près d’un quart des cadres français y travaillent. Elle rassemble 23 % des universités françaises, 25 % des écoles d’ingénieurs (hors universités) et 22 % des écoles de commerce françaises. 20 % des exportations françaises sont produites en Île-de-France.
L’Île-de-France est marquée de longue date par un déséquilibre au niveau de son territoire entre les emplois se situant plutôt en son cœur, au Nord et à l’Ouest et la population qui a élu résidence à l’Est. Les politiques d’aménagement de la région mises en œuvre à partir des années 1960 ont tenté d’éviter une congestion avec notamment la création de plusieurs villes nouvelles et des lignes de RER. Cette politique a eu des effets, la croissance de l’emploi et de la population au sein de Paris et de sa petite couronne étant, entre 1975 et 2015, en moyenne plus de cinq fois plus faible que dans le reste de l’Île-de-France. La croissance est la plus forte dans les zones situées entre 20 et 40 kilomètres de la capitale. Cette politique atteint néanmoins ses limites. Au-delà de 40 kilomètres du centre, la croissance démographique est plus forte que celle de l’emploi. Ce phénomène s’explique par le phénomène de départs des actifs du centre du fait des prix trop élevés des logements et de l’arrivée de personnes extérieures à la région qui s’installent dans sa périphérie.
Une sphère d’influence qui dépasse ses frontières juridiques
La sphère d’influence de Paris s’étend jusqu’à 100 kilomètres et dépasse de loin les contours de la région administrative. L’existence de réseaux routiers et ferroviaires en étoile favorise cette absorption des villes situées aux marges. Ainsi, après Mantes, Vernon dans le département de l’Eure (située à 100 kilomètres de Paris), tout comme Bernay (à 150 kilomètres de Paris), dépendent de plus en plus de la région parisienne. Le nombre de personnes devenues « navetteurs » qui se rendent chaque jour en Île-de-France pour y travailler s’est fortement accru ces vingt dernières années. Avec la désindustrialisation, les petites villes de la proche province ont perdu de nombreux emplois obligeant les actifs à changer de lieu de travail. Par ailleurs, des Parisiens ont choisi, tant pour des raisons de coûts que de conditions de vie, de vivre en-dehors de l’agglomération parisienne. À Bernay, les usines textiles ainsi que celles liées à la Chimie ont fermé ou ont réduit leurs effectifs. Le nombre de navetteurs avec les zones d’emploi d’Île-de-France représente plus de 10 % des personnes en emploi de la zone. En 2015, pour Évreux, cette proportion était, selon l’INSEE, de 15 % des actifs occupés résidents et jusqu’à 40 % pour Dreux. Parmi ces zones d’emploi, sept se distinguent par un volume d’échanges dépassant les 10 000 navetteurs, en raison de leur taille plus importante ou des liens plus intenses avec l’Île-de-France. Les dynamiques d’emploi et de population y sont les plus favorables. La zone d’emploi de Pithiviers, de taille relativement modeste, échange quotidiennement 6 900 navetteurs avec l’Île-de-France, soit l’équivalent de 30 % de ses actifs occupés résidents, et présente une croissance de l’emploi et de la population similaire. À l’inverse, la zone d’emploi de Dreux se caractérise par une moindre augmentation de l’emploi sur la période.
Pour l’ensemble de la Normandie, c’est la baisse de l’emploi dans l’industrie automobile et dans l’industrie pétrolière qui a généré une dépendance accrue à la région parisienne. Les villes mêmes importantes sont de plus en plus dominées par l’activité présentielle (commerces, services à la personne, immobilier, tourisme) et de moins en moins par l’industrie et les services aux entreprises.
La constitution d’un réseau de lignes à grande vitesse a joué un rôle important dans le changement des activités économiques dans certaines régions. Ainsi, Tours, se situant à 240 kilomètres de Paris mais à une heure de TGV connaît un nombre important de navetteurs (plus de 5000 feraient le déplacement quotidien par train avec Paris). Cela concerne encore plus les habitants de la région de Vendôme. Amiens, Rouen, Troyes, Auxerre, Senlis, Reims mais aussi Lille sont concernés par ce phénomène. Plus de 200 000 personnes provenant des régions « Centre Val de Loire », « Normandie », « Hauts de France », « Bourgogne » et « Grand Est » se rendraient chaque jour en Île-de-France.
L’influence de l’Île-de-France est particulièrement marquée dans le Nord et l’Ouest. Cette situation s’explique tant par l’existence de liens anciens, de moyens de communication mais aussi par une population active rendue disponible du fait de la désindustrialisation.
À l’ouest, Chartres, Dreux, Évreux et Vernon, au Nord, Beauvais, Compiègne, Soissons, Senlis sont entrés dans la sphère d’influence parisienne pour les emplois. Au Sud et l’Est, ce sont également le cas d’Auxerre, de Château-Thierry, de Montargis et de Sens. Au niveau des départements, la région capitale attire en nombre les actifs issus de 12 départements : l’Yonne, l’Eure-et-Loir, le Loiret, le Loir-et-Cher, l’Indre-et-Loire, la Marne, l’Aube, l’Aisne, la Somme, l’Oise la Seine-Maritime et l’Eure.
L’Île-de-France, un cas à part
Lyon et Marseille ont des sphères d’influence beaucoup plus faibles que Paris, moins de 50 kilomètres. L’existence d’agglomérations importantes se situant à quelques dizaines de kilomètres, ainsi que la taille inférieure de la ville centre, expliquent cette différence. Lyon doit compter avec Saint Etienne, Grenoble, Chambéry voire Annecy. Marseille est en concurrence avec Toulon, Montpellier et Aix-en-Provence.
À 50 kilomètres, c’est le désert autour de Paris au niveau des agglomérations. Creil n’arrive qu’en 50e position au niveau du nombre d’habitants quand Saint Etienne est la 16e ville de France et Toulon la 9e. Cette différence dans l’organisation urbaine entre l’espace autour de Paris d’une part et ceux autour de Lyon et de Marseille d’autre part confirme la singularité de l’agglomération parisienne au sein de la hiérarchie urbaine française. L’emprise de Lyon et de Marseille sur les marchés locaux du travail de leur périphérie est nettement moindre. Pour ces zones d’emploi, les déplacements domicile-travail vers l’agglomération qui leur est proche se réduisent considérablement dès 50 km. À 100 km, ils représentent moins de 1 % des personnes en emploi résidentes.
Une concentration de plus en plus forte des emplois
Si le phénomène de métropolisation a particulièrement profité aux territoires limitrophes à l’Île-de-France sur une période longue de quarante ans, la situation diffère ces dernières années, à la suite de la crise économique et financière de 2008-2009. Entre 2010 et 2015, tandis que la population continue d’augmenter à un rythme proche de celui observé depuis la fin du baby-boom en France métropolitaine, l’emploi stagne, alors que son évolution est positive sur quarante ans (+0,5 % en moyenne par an). Ce décrochage ne semble pas affecter Paris et sa petite couronne, où le rythme de croissance de l’emploi, tout comme celui de la population, se maintient. L’emploi dans le reste de l’Île-de-France demeure stable entre 2010 et 2015, alors qu’il augmente de 1,1 % en moyenne sur longue période. Sur ce même territoire, l’accroissement démographique ralentit également, mais dans une moindre mesure. De manière similaire, aucune zone d’emploi ayant des liens privilégiés avec l’Île-de-France n’affiche de hausse de l’emploi après la crise. Cette situation moins favorable s’observe également en matière de population, même si la plupart des territoires continuent à gagner des habitants. Les grandes villes autour de Paris ont mieux résisté, au contraire des territoires les plus liés à Paris. Ainsi, alors que ces derniers présentaient les évolutions les plus favorables de l’emploi et de la population avant la crise, ils suivent des dynamiques comparables à celles des grandes villes autour de Paris sur ces dernières années. Le phénomène de fort ralentissement qui affecte l’espace autour de la capitale après la crise se retrouve également autour des autres plus grandes agglomérations de France, Lyon et Marseille.
Le prix de l’immobilier explique ce changement. La baisse de l’emploi industriel au sein même de la région capitale joue également un rôle majeur. Les créations de postes dépendent de plus en plus des services. L’économie présentielle joue un rôle croissant en France ce qui peut également modifier dans les années à venir les rapports de force entre les différents pôles. L’Île-de-France a aspiré de nombreux emplois ces dernières années avec comme conséquence un appauvrissement économique de ses marges. Du fait de sa forte connexion avec les autres grandes métropoles internationales, cet isolement national ne lui a pas nui. Cette situation pourrait néanmoins lui porter à terme préjudice. Aujourd’hui, ce sont des régions disposant de plusieurs grandes villes complémentaires qui enregistrent les meilleurs taux de croissance. En France, les Pays de la Loire avec Nantes, Angers, Laval, Le Mans, Chollet, la Roche-sur-Yon, enregistrent de bons résultats économiques. Se situant à bonne distance de Paris, cette région a pu développer son écosystème dans une relative indépendance avec la capitale. La région Auvergne-Rhône-Alpes peut également s’appuyer sur un puissant réseau de villes de plus de 100 000 habitants et sur une économie diversifiée. Même si le nombre de navetteurs progresse, Lille arrive à maintenir ses positions économiques en pouvant compter sur les liens qui ont résisté avec les autres grandes villes du Nord (Dunkerque, Arras, Calais, Roubaix et Tourcoing). La région Val de Loire a pâti du manque de liens entre ses villes. La concurrence entre Tours et Orléans a favorisé leur entrée dans la sphère d’influence parisienne.
La région Île-de-France a connu un essor dans les années 1990/2000 qui n’a pas été accompagné en matière de transports publics. La congestion des réseaux actuels a contraint les pouvoirs publics à s’engager dans le projet de Grand Paris avec la création de plusieurs nouvelles lignes de métro. Le développement du nombre de navetteurs n’a pas été freiné par la détérioration du service sur certains lignes de trains (Paris-Évreux-Caen, Paris-Rouen-Le Havre ou Paris-Orléans). La saturation du réseau routier, l’augmentation du prix des péages et celui de l’essence n’ont pas eu d’effets dissuasifs. La contrainte de l’emploi et du logement l’a emporté sur ces inconvénients. Contrairement à une idée reçue, Internet n’a pas ralenti la concentration des emplois en faveur de la région capitale. Les techniques de l’information et de la communication, au contraire, incitent à la centralisation des activités autour des centres de recherche, des établissements d’enseignement supérieurs et des grandes entreprises donneuses d’ordre.
La région parisienne manque de villes d’équilibre se situant entre 150 et 200 kilomètres. Ce rôle devrait être joué par Rouen, Le Havre, Caen, Reims, Orléans et Tours voire Auxerre.
L’Île-de-France attire les diplômés des régions voisines. Ces derniers choisissent soit de migrer en son sein, soit de devenir des navetteurs. Les non-diplômés exerçant des emplois non qualifiés sont contraints d’habiter de plus en plus loin du cœur de l’agglomération. En habitant des villes de province situées aux marges de l’Île-de-France, ils en modifient la structure et les habitudes ainsi que la nature des votes aux élections. Ces migrations génèrent des cercles vicieux. Les activités en périphérie deviennent de plus en plus présentielles condamnant les actifs les plus expérimentés à rechercher de l’emploi en région parisienne. L’appauvrissement économique qui en résulte n’est qu’en partie compensé par les revenus en provenance de cette région. Le taux de chômage des régions limitrophes de l’Île-de-France est plus élevé que celui de cette dernière. C’est tout à la fois une cause et une conséquence des migrations d’actifs que génère la première région française.
Concurrence, l’Europe n’est pas aussi naïve que certains voudraient le faire croire
Le refus de la fusion Siemens/Alstom par la Commission européenne a été sévèrement jugé tant par le Gouvernement français que par de nombreux experts. La Commission a justifié sa décision en se fondant sur le droit de la concurrence. Ce dernier est-il devenu une entrave au bon développement de l’économie européenne ou joue-t-il son rôle pour lutter contre la constitution de situation de monopole ?
Les européens sont schizophrènes en matière de concurrence. Ils entendent lutter contre les oligopoles au nom de la défense des droits des consommateurs et afin de faire baisser les prix. Ils peuvent estimer que les situations de position dominante empêchent l’essor de PME et aboutissent à des pratiques peu en phase avec le développement durable (agriculture par exemple). Ils dénoncent le rôle des multinationales surtout d’origine américaine ou chinoise. Par ailleurs, ces mêmes européens critiquent la Commission ou les États membres quand ces derniers freinent ou empêchent des fusions de se réaliser. Cette dernière position est justifiée par la nécessité de constituer des géants européens pouvant faire face aux à leurs concurrentes étrangères.
Depuis 2000, l’Europe défend plutôt une politique concurrentielle. Les concentrations y sont moindres qu’aux États-Unis. Le Conseil d’analyse économique a réalisé une étude pour apprécier l’importance et les effets des concentrations. Les rapporteurs de l’étude ont comparé l’évolution des prix par rapport au coût unitaire du travail entre l’Europe et les États-Unis. Cet exercice mené sur les dix principaux pays de l’Union européenne et les États-Unis montre que sur la période 2000-2015, les prix ont augmenté de 15 % de plus aux États-Unis qu’en Europe mais les salaires de seulement 7 %. La marge prix/salaire a ainsi baissé d’environ 8 % en Europe par rapport aux États-Unis. Pour un travailleur au salaire médian cela représente une hausse de 8 % du pouvoir d’achat. Par ailleurs, les baisses de prix en Europe résultent souvent de mesures de politique économique ayant des effets pro-concurrentiels.
La concurrence est plébiscitée quand par exemple, à la suite de l’octroi d’une quatrième licence à Free en France en 2011, les prix des télécommunications ont baissé de 40 % en moins d’un an. Les prix des services de télécommunication, qui, selon une étude du Conseil d’analyse économique de 2019 étaient plus élevés en France qu’aux États-Unis, sont devenus plus bas et le sont restés.
Les partisans de la limitation du droit de la concurrence mettent en avant que dans une économie à forte intensité capitalistique, les entreprises doivent avoir une taille suffisante pour innover et investir. Or, la pertinence empirique de cette thèse n’est pas vérifiée. Aux États-Unis, depuis vingt ans, les concentrations qui ont été réalisées dans les secteurs de l’électronique, de l’informatique ou de la chimie ont abouti à une appréciation du cours des actions et à une augmentation des bénéfices mais à une diminution des dépenses de recherche/développement. En Europe, la politique de la concurrence s’est traduite par des prix plus bas et une productivité au moins équivalente à celle des États-Unis. La relative faiblesse de l’innovation en Europe a de nombreuses causes, mais la politique de la concurrence n’est probablement pas l’une d’entre elles. L’absence de marchés de capitaux unifiés, la méfiance des Européens à l’encontre du progrès et une formation moins centrée sur les sciences qu’au Japon, e Corée ou aux Etats-Unis expliquent la faiblesse de l’Europe en matière d’innovations.
La politique de la concurrence est à la base de la construction européenne. L’Europe s’est bâtie sur l’idée d’un marché commun offrant à chaque entreprise la possibilité de commercer librement en son sein. La remise en cause de cette politique serait une rupture majeure dans le processus de construction de l’Europe. La lutte contre les ententes, les situations de positions dominantes visaient tout à la fois à rendre le marché plus fluide et à faciliter le développement de tous les États membres.
Même si le droit de la concurrence est une des pierres angulaires de l’Union européenne, son impact au quotidien demeure modeste. Ainsi sur la période allant de janvier 2010 à décembre 2018, parmi les 2 980 opérations de concentrations notifiées à la Commission, 2 704 ont été acceptées sans conditions (90,7 %) et 156 opérations ont été autorisées sous conditions. Parmi ces fusions acceptées, certaines ont donné naissance à des champions européens de très grande taille, à l’image des fusions entre Luxottica et Essilor dans l’optique et entre Lafarge et Holcim dans le ciment. 7 opérations ont été refusées par la Commission dont 2 impliquaient des entreprises américaines. De ce fait, si la préservation de la concurrence peut contraindre à des cessions d’actifs de la part des entreprises voulant fusionner, le contrôle des concentrations n’apparaît pas comme un obstacle à l’émergence de grandes entreprises européennes.
Les instances nationales des États membres ont, en outre, tendance à atténuer les décisions des autorités européennes. Ainsi, en France, l’autorité de la concurrence a ainsi revu à la baisse les engagements que le Groupe Canal+ avait pris lors de sa fusion avec TPS puis lors du rachat des chaînes Direct 8 et Direct Star compte tenu de l’arrivée sur le marché de Netflix et d’Amazon.
En matière de subventions ou d’aides de la part des États en faveur d’entreprises en difficulté, la Commission a modifié, ces dernières années, ses positions en intégrant la nature, le rôle et la durée des aides pour apprécier si elles faussent ou non les règles du marché. Dans le cadre européen, les aides d’État portent le risque de stratégies non coopératives des États membres. Cela explique le cadre strict appliqué en Europe, qui peut susciter la crainte que des investissements publics ne soient pas mis en œuvre alors qu’ils seraient socialement profitables.
En matière de lutte anti-dumping, la Commission européenne bénéficie d’une compétence exclusive. L’Europe est assez active contrairement à quelques idées reçues pour défendre son marché intérieur. Si la compétence est plutôt de nature fédérale, la mise en œuvre des procédures est toutefois subordonnée à un examen par le Comité des instruments de défense commerciale, composé de représentants des États membres, qui peut s’opposer aux préconisations de la Commission par une majorité qualifiée. L’Europe inscrit ses actions de lutte contre le dumping dans le cadre de l’Organisation Mondiale du Commerce. Si des preuves sont fournies, la Commission peut appliquer aux produits en question des droits anti-dumping compensant l’écart lié à ladite pratique. 94 mesures anti-dumping étaient en vigueur fin 2018 (27 d’entre elles étant étendues à des pays tiers pour éviter d’être contournées), dont les deux tiers concernaient la Chine.
Les aides d’État peuvent être utilisées pour une réponse européenne active. Sans entrer dans le débat complexe de la politique industrielle européenne, la question se pose de savoir si la réponse de l’Union doit également prendre des formes plus actives. À cet égard, la politique de la concurrence est souvent considérée comme un frein étant donné les disciplines qu’elle impose aux aides d’État. En la matière, la principale critique d’ordre général formulée à l’égard de la politique industrielle est que la puissance publique est mal placée pour sélectionner les entreprises bénéficiaires de ses actions (picking ???).
Comment rendre le métier de professeur plus attractif ?
La question de la formation devient de plus en plus cruciale tant en termes de compétitivité économique qu’en termes d’accomplissement personnel. Les États occidentaux sont confrontés depuis plusieurs années à des problèmes de recrutement pour les postes d’enseignants. Une récente étude réalisée par l’OCDE souligne que les pays membres doivent rendre le professorat plus intéressant d’un point de vue financier et intellectuel pour pouvoir attirer des jeunes actifs à fort potentiel. L’enquête de l’organisation internationale a été menée auprès de 260 000 enseignants et chefs d’établissement de 15 000 établissements primaires et secondaires des premier et deuxième cycles dans 48 pays et économies (troisième édition de l’enquête TALIS).
L’enseignement reste une vocation
L’enseignement était le premier choix de carrière de deux professeurs sur trois dans les pays de l’OCDE participants, mais pour seulement 59 % des hommes, contre 70 % des femmes. 90 % des enseignants citent la possibilité de contribuer au développement des enfants et d’œuvrer pour la société comme l’un des principaux déterminants de leur choix de carrière, et 61 % seulement précisent que la stabilité professionnelle offerte par l’enseignement a compté dans leur décision.
Une population majoritairement féminine
Les enseignants ont, en moyenne, 44 ans. L’âge moyen va de 36 ans en Turquie à 50 ans en Géorgie. La plupart des enseignants sont des femmes (68 %), hormis au Japon (42 %), mais elles ne représentent que 47 % des chefs d’établissement.
Le travail en classe entre instruction et discipline
Dans les pays de l’OCDE, 78 % seulement d’un cours type sont consacrés à l’instruction, le reste étant consacré à la discipline (13 %) et aux tâches administratives (8 %). Cette répartition varie selon les États membres et selon la nature des établissements. Le temps passé en classe à l’instruction proprement dite est bien moindre dans les établissements accueillant un nombre élevé d’élèves issus de milieu socioéconomique défavorisé. Les écarts sont particulièrement marqués en Afrique du Sud, en Arabie saoudite, en Alberta (Canada), en Australie, en Autriche, en Angleterre, en Belgique (Communauté flamande), aux États-Unis et en France. Dans notre pays, les établissements en quartier défavorisés sont marqués par des problèmes de discipline croissants mettant en danger l’instruction des élèves. 14 % des chefs d’établissement ayant répondu à l’enquête de l’OCDE signalent des actes réguliers d’intimidation ou de harcèlement entre élèves. Ce taux est certainement minoré du fait du refus d’admettre l’existence de problèmes au sein des établissements.
La formation des enseignants
Plus de 90 % des enseignants et chefs d’établissement ont suivi au moins une activité de formation professionnelle au cours des douze mois précédant l’enquête, mais seuls 44 % d’entre eux suivent des formations sous forme d’apprentissage par les pairs et par réseau, alors que l’apprentissage collaboratif est identifié par les enseignants comme ayant le plus d’incidence sur leur travail. La moitié environ des enseignants et des chefs d’établissement interrogés précisent que leur participation aux activités de perfectionnement professionnel disponibles est limitée par des contraintes d’emploi du temps et par un manque d’incitations.
Le recours croissant aux nouvelles technologies
L’OCDE montre dans son étude que dans les États membres les enseignants sont insuffisamment formés à l’utilisation pédagogique des technologies de l’information. Un peu plus de la moitié (56 %) des enseignants dans l’OCDE ont été formés à l’utilisation des TIC appliquées à l’enseignement dans le cadre de leurs études ou de leur formation. Deux tiers d’entre eux indiquent que la formation professionnelle la plus utile qu’ils aient suivie portait sur l’innovation dans l’enseignement.
C’est en Suède et en Espagne que la formation aux TIC est la moins répandue (respectivement, 37 % et 38 %), tandis qu’elle est courante au Chili (77 %) et au Mexique (77 %). Environ 18 % des enseignants dans l’OCDE font toujours état d’un besoin important de perfectionnement professionnel en TIC appliquées à l’enseignement.
La France se situe en-dessous de la moyenne de l’OCDE pour l’utilisation des TIC et pour la formation des enseignants.
Pour une plus grande autonomie des établissements
Les rapporteurs de l’étude de l’OCDE estiment que les systèmes éducatifs donnant une large autonomie aux établissements et accordant de larges responsabilités aux enseignants et aux chefs d’établissement obtiennent de meilleurs résultats. Par ailleurs, cette responsabilisation doit passer par une forte association du corps professoral dans l’élaboration de pratiques en vue de faciliter la modernisation des salles de classe et des enseignements délivrés. Dans une grande majorité des pays, les enseignants travaillent afin d’ouvrir l’école sur de nouvelles pratiques. Malgré tout, l’OCDE note qu’en Europe et notamment, en France, cette ouverture aux nouvelles technologies, est moindre qu’aux États-Unis et qu’en Asie.