29 février 2020

Le Coin des Tendances

Qui sont les électeurs français ?

Entre mars 2020 et mars 2021, la France renouvellera l’ensemble des élus locaux qu’ils soient municipaux, départementaux ou régionaux. Par ailleurs, au mois de septembre 2020, la moitié des sièges du Sénat seront remis en jeu. Ces élections précèderont en 2022 l’élection présidentielle et les élections législatives. Une telle concentration des élections ne s’est produite que rarement sous la Ve République. L’étude du corps électoral et de son évolution sera particulièrement importante pour les différents candidats. Pour les élections locales, en plus des électeurs de nationalité française, les ressortissants de l’Union européenne peuvent également voter.

94 % des résidents français en âge de voter sont inscrits sur les listes électorales

Au 14 février 2020, 47,7 millions d’électeurs sont inscrits sur les listes électorales françaises hors Nouvelle-Calédonie. 46,0 millions sont des électeurs français inscrits sur une liste communale principale (44,3 millions en France métropolitaine, 1,5 million dans les DOM et 240 000 dans les collectivités d’Outre-mer hors Nouvelle-Calédonie). Parmi les Français résidents à l’étranger, 1,3 million sont inscrits sur une liste consulaire. Quatre listes consulaires comptent plus de 50 000 électeurs. La première liste est celle de Genève (114 000 électeurs), suivie par ceux de Londres, Bruxelles et Montréal. 330 000 sont des ressortissants d’un autre État-membre de l’Union européenne inscrits soit au titre des listes municipale ou européenne ou les deux.

Grâce à la procédure de l’inscription d’office, 99 % des adultes de moins de 30 ans sont inscrits sur une liste électorale. Le taux d’inscription est plus faible pour les 30-44 ans (91 %) car tous les électeurs ne se réinscrivent pas sur la liste de leur nouvelle commune après un déménagement, mais peuvent être radiés de l’ancienne par la mairie qui constate leur « perte d’attache communale ». Pour les personnes de 45 ans ou plus, le taux d’inscription augmente (93 %). Du fait d’une espérance de vie plus longue, le corps électoral est majoritairement féminin. Les femmes représentent 52,1 % des électeurs.

Depuis le 14 avril 2019, le nombre d’inscrits sur les listes électorales a augmenté de 544 000 personnes. Les listes principales gagnent 500 000 électeurs et les listes consulaires 44 000. Malgré le Brexit et la radiation de 46 000 électeurs britanniques, les listes complémentaires ne perdent que 1 400 électeurs. Cette progression du nombre d’inscrits s’explique par la démographie. Ce sont les enfants du petit baby-boom de l’an 2000 qui peuvent désormais voter. 657 000 jeunes, nés en 2001 et début 2002, ont été inscrits d’office au cours de cette période sur les listes électorales, alors que seules 409 000 personnes décédées ont été radiées, soit un solde net de +248 000. À cela s’ajoutent environ 52 000 inscriptions d’office liées à l’acquisition de la nationalité française. Il convient de souligner que les radiations pour décès sont inférieures au nombre de décès enregistrés en 2019 en France (612 000).

Entre avril 2019 et février 2020, 264 000 personnes ont été radiées pour perte d’attache communale. Sur la même période, 2,4 millions d’électeurs se sont inscrits ou réinscrits volontairement sur liste électorale, 750 000 ayant fait cette inscription en ligne, soit trois électeurs sur dix. Les inscriptions ont été particulièrement nombreuses en début d’année. 1,4 million ont eu lieu depuis le 1er janvier 2020, dont 510 000 par Internet.

330 000 électeurs ressortissant d’un autre État-membre de l’Union européenne sont inscrits sur au moins une des deux listes complémentaires des communes. Avec 111 600 inscrits, les Portugais sont les plus nombreux sur les listes complémentaires, suivis par les Italiens (55 300), les Belges (47 500), les Espagnols (33 900), les Allemands (33 600) et les Néerlandais (17 700). À l’opposé, les électeurs maltais sont les moins nombreux avec seulement 60 électeurs. Les 46 000 Britanniques présents en début d’année ont été radiés des listes à la suite du Brexit le 31 janvier 2020.

12 premières nationalités de l’UE – Cercle de l’Épargne – INSEE

Les électeurs se concentrent dans les départements comportant une métropole. 57 % des électeurs vivent dans trente départements sur les 101 que comptent la France.

La région Hauts-de-France place deux de ses départements parmi les dix premiers en ce qui concerne le nombre des électeurs. L’Île-de-France en place trois. Au sein de ce classement, il est à souligner la deuxième place occupée par le département des Bouches-du-Rhône qui comprend Marseille.

Cercle de l’Épargne – INSEE

Les paradoxes de l’immobilier

L’immobilier reste année après année un des problèmes majeurs de la société française. Les progrès accomplis en matière de conditions d’habitat réalisées durant les Trente Glorieuses sont remis en cause depuis une dizaine d’années du fait notamment de la métropolisation. Le modèle français reposant sur un large parc locatif social accentue la segmentation de la population et ne facilite plus le passage de la location à la propriété.

En soixante ans, le marché immobilier s’est fortement segmenté. Le taux de propriétaires est passé de 40 à 58 %. L’acquisition de la résidence principale a concerné les ménages les plus aisés. Il en a résulté une baisse du niveau moyen des ressources des locataires. Malgré une hausse assez modérée des loyers, les locataires ont dû consacrer une part de plus en plus importante de leurs ressources au poste logement ; le taux d’effort des locataires du secteur libre est même proche de celui des accédants à la propriété (27 %).  Dans le parc social, le taux d’effort s’élève à 23 %.

Le taux d’effort net moyen immobilier (y compris taxes foncières et d’habitation) dépasse désormais 18 % contre 16,1 % en 2001. Près d’un ménage sur dix est confronté à un taux d’effort net supérieur à 44 %. Les ménages qui ont des taux d’effort importants, sont plus souvent des personnes seules, des familles monoparentales, habitant Paris ou une unité urbaine de plus de 100 000 habitants.

En 2018, la Fondation Abbé Pierre estime à 3,9 millions de personnes, le nombre de mal logées en France. Dans cette catégorie sont prises en compte les personnes qui vivent dans des conditions de logement très difficiles (privation de confort, surpeuplement accentué) et les personnes privées de logement (SDF, personnes contraintes de résider chez un tiers ou dans des chambres d’hôtels, etc.). Outre ces situations les plus graves, la Fondation Abbé Pierre évalue à 12,1 millions de personnes fragilisées par rapport au logement (personnes en situation d’effort financier excessif, surpeuplement modéré, propriétaires occupant un logement dans un copropriété en difficulté, etc.). Au total, sans les doubles comptes, la fondation Abbé Pierre évalue que « près de 15 millions de personnes (14,6 millions) sont touchées, à un titre ou à un autre, par la crise du logement ».

Un parc de logements de bonne qualité

Près de 78 % des logements en France, contre 75 % en 2001, ne présentent, selon l’INSEE aucun défaut. En 2013, seuls 1 % des logements manquent du confort sanitaire de base et 3 % (incluant les précédents) présentent plus d’un défaut grave d’isolation thermique, d’étanchéité ou d’installation électrique. Plus de 2 millions de personnes sont concernées par l’existence de deux défauts graves ou plus de leur logement. Près d’un million de personnes sont en situation de surpeuplement accentué dans leur logement. Mais toujours selon l’Enquête « Logement » de l’Insee, si le surpeuplement a été divisé par deux entre 1984 et 2006, il est depuis en hausse. Cette évolution est en lien avec la métropolisation du territoire qui se traduit par une proportion croissante de la population au sein des grandes agglomérations. L’augmentation du prix de l’immobilier conduit les ménages à opter pour des surfaces plus faibles qu’auparavant.

Le surpeuplement, une affaire de métropoles et avant tout parisienne

Le surpeuplement concerne 21 % des ménages dans l’unité urbaine de Paris. Ce phénomène touche particulièrement les familles à revenus modestes (18 %) et les familles monoparentales (18 %). La proportion de famille en surpeuplement dans les familles dites traditionnelles est de 7 %. Les jeunes sont également plus concernés que leurs aînés (15 % des moins de 30 ans contre 3,5 % des 55 ans et plus).

La précarité énergétique, un problème maîtrisé ?

En 2017, 11,6 % des ménages seraient en situation de précarité énergétique, contre 14,5 % en 2013. L’évolution de la précarité énergétique dépend des conditions climatiques. En 2013 l’hiver a été particulièrement rigoureux, ce qui a accru les besoins de chauffage dans les logements, et donc tiré à la hausse les factures d’énergies acquittées par les ménages cette année-là. En 2017 en revanche, les températures hivernales ont été plus douces que la moyenne observée depuis 30 ans. En intégrant le facteur climatique, le taux de précarité énergétique estimé s’élève à 11,9 % en 2017, contre 13,8 % en 2013. Le recul du phénomène demeure mais est plus modéré. Les pouvoirs publics ont adopté depuis dix ans plusieurs mesures visant à aider les ménages les plus modestes.

En 2018, 15 % des Français déclarent avoir souffert du froid dans leur logement pendant au moins 24 heures au cours de l’hiver 2017/2018. Pour 41 % d’entre eux, cette situation est imputable à la mauvaise isolation de leur logement. 30 % des ménages indiquent restreindre leurs consommations d’énergie en raison de son coût et qu’un ménage sur dix rencontre des difficultés pour payer certaines factures d’électricité ou de gaz naturel.

Comme elle l’avait déjà fait à plusieurs reprises dans le passé, la Cour des Comptes a souligné dans son rapport annuel 2020 le caractère inefficient de la politique d’aide au logement. Cette année, les magistrats de la rue Cambon se sont focalisés sur les Aides Personnalisées au Logement (APL) versés à 6,6 millions de ménages pour un montant total de 17 milliards d’euros par an. Les APL représentent plus de 40 % des sommes consacrées à la politique du logement et 30 % de l’effort de redistribution globale en direction des 10 % des ménages aux revenus les plus modestes, qui constituent plus de 75 % des bénéficiaires. La Cour des Comptes critique la baisse des APL décidée depuis plusieurs années, baisse qu’elle juge mal ciblée en pénalisant les plus modestes. Elle estime que la disposition de prise en compte du patrimoine pour l’attribution des APL est injuste car elle ne concerne que les nouveaux entrants, en raison des difficultés rencontrées pour collecter les informations nécessaires auprès des allocataires. La Cour critique également les réductions de ressources supportées par les bailleurs obligés de baisser les loyers. En revanche, la Cour a approuvé le calcul des APL en fonction des revenus de l’année en cours et non plus en fonction de ceux de l’année N-2. La Cour estime que les personnes à revenus modestes mais en emploi sont moins bien traitées que les inactifs. Elle considère que les APL spécifiques aux étudiants devraient prendre en compte des conditions de ressources. Les étudiants rattachés au foyer fiscal de leurs parents en bénéficient s’ils n’habitent pas chez eux. La Cour des comptes propose que les étudiants choisissent entre le bénéfice de l’aide et le rattachement au foyer fiscal des parents.

La Cour des Comptes souligne également la complexité des règles entourant les APL, règles générant des coûts de gestion importants. La politique du logement est, en France, souvent accusée de favoriser la hausse des prix des logements et des loyers. Si le constat est admis, la réforme de la politique du logement est un sujet délicat en raison de ses implications sociales et économiques. La remise en cause des aides à la construction (TVA réduite, dispositifs de réduction d’impôt) bute sur ses conséquences à court terme sur l’activité du secteur du bâtiment. Le changement des règles en matière d’allocation entraîne toujours de violentes réactions épidermiques comme l’a prouvé la baisse de 5 euros des APL décidée en 2017.