le Coin des Tendances
Les Britanniques, en dehors de l’Union mais bien présents en France
En 2016, 148 300 Britanniques résidaient, à titre principal, en France qui est leur deuxième pays d’accueil après l’Espagne (300 000 dans ce pays). Les Britanniques représentent 0,2 % des habitants de France. Ils arrivent au 4e rang des ressortissants européens résidant sur le territoire français, derrière les Portugais (546 100 habitants), les Italiens (194 600 habitants) et les Espagnols (157 400 habitants). Avec le Brexit, les ressortissants devront disposer d’une carte de séjour à compter de 2021. Le départ de l’Union européenne a déjà abouti à freiner les acquisitions de biens immobiliers par les Britanniques, les problèmes économiques (avec la dévaluation de la livre) s’ajoutant aux problèmes juridiques. La crise sanitaire qui restreint la circulation entre le Royaume-Uni et les États membres de Schengen complique actuellement leurs déplacements.
Pour leur implantation, les Britanniques sont à la recherche d’un cadre de vie moins urbanisé et de propriétés à coût plus abordable que dans leur pays, et privilégient les territoires à faible densité. Leurs choix diffèrent de ceux des Belges ou des Allemands qui préfèrent des zones frontalières ou plus urbanisées. 19 % des Britanniques résident dans des communes très peu denses contre 9 % des Belges et 5 % des Allemands. 20 % des Néerlandais résident également dans ce type de communes, mais ils sont quatre fois moins nombreux.
Les Britanniques se concentrent dans le Grand Sud-Ouest de la France. 43 % des Britanniques installés en France habitent en Nouvelle-Aquitaine ou en Occitanie (respectivement 39 200 et 24 900 personnes). Ces deux régions offrent plusieurs atouts aux yeux des Britanniques. Relativement ensoleillées et abordables, elles sont faciles d’accès depuis le Royaume-Uni. La présence britannique dans cette région date de la reine Aliénor d’Aquitaine qui épousa, en 1152, le duc de Normandie. Ce dernier devint, en 1154, roi d’Angleterre sous le nom d’Henri II Plantagenêt. Vers 1170, Richard Cœur de Lion devient comte de Poitiers et duc d’Aquitaine. Il est couronné à Limoges qui est alors le lieu traditionnel de couronnement en Aquitaine. La rivalité entre les couronnes de France et d’Angleterre aboutit à la guerre de Cent Ans en 1337. Le 8 mai 1360, lors du traité de Brétigny, la France perd l’Aquitaine (Guyenne, Gascogne, Quercy, Rouergue, Limousin et Poitou), le Ponthieu et Calais au profit des Anglais. L’essentiel sera reconquis, à l’exception de la Guyenne, par Du Guesclin entre 1370 et 1380. Le succès du golf et du rugby en Aquitaine et en Occitanie, témoigne de la persistance de la présence britannique à travers les siècles.
Au XIXe siècle et au début du XXe siècle, les Britanniques se rencontraient également sur la Côte d’Azur et à Nice tout particulièrement. Ils s’installèrent également à Ajaccio (dans le quartier des étrangers) et à Biarritz. Ils y ont depuis maintenu une présence. Ils sont également plus présents à l’intérieur des terres bretonnes et au Sud-ouest de la Normandie, zones plus proches des côtes anglaises. Ils sont également nombreux en Savoie et en Haute-Savoie en raison d’une appétence certaine pour l’alpinisme. Au XVIIIe siècle, des Britanniques fortunés, accompagnés de guides locaux, Alfred Wills, Leslie Stephen, Edward Whymper, etc. ont conquis la plupart des sommets des Alpes et posé les fondements d’une nouvelle discipline, l’alpinisme sportif. Le 14 juillet 1865, l’explorateur Edward Whymper conquit le Cervin (ou Matterhorn), un sommet de 4 478 mètres à la frontière italo-suisse. Chamonix attire alors de nombreux Britanniques. En 2016, les Britanniques représentaient encore 5 % à Chamonix-Mont-Blanc et 9 % à Morzine.
Si la présence britannique sur le territoire français est ancienne, elle s’est amplifiée ces trente dernières années. En 1990, seulement 65 300 Britanniques étaient installés en France. Vingt-six ans plus tard, leur nombre a plus que doublé. Cette augmentation coïncide avec une forte hausse des prix de l’immobilier Outre-Manche, rendant l’accès à la propriété plus difficile. Le développement des transports aériens à bas coûts a soutenu ce mouvement. Les liaisons régulières aériennes entre la France et le Royaume-Uni ont en effet triplé entre 1996 et 2007. Les aéroports de Brive, de Limoges, de Bordeaux, de Biarritz disposent de liaisons avec le Royaume-Uni. Le tunnel sous la Manche a également été mis en service au début de cette période. Depuis la crise financière de 2008, l’augmentation du nombre de ressortissants britanniques installés en France se ralentit. Le recul de la devise britannique (-20 % par rapport à l’euro entre 2006 et 2011) diminue le pouvoir d’achat des retraités établis en France dont les pensions sont en livre sterling. Avec le Brexit, leur nombre tend à diminuer encore.
55 000 des Britanniques présents en France y travaillent. Ils occupent des emplois de gestion, de cadres et de professions intellectuelles. Ils résident essentiellement dans les grandes métropoles (Paris, Lyon, Lille, Bordeaux ou Toulouse). Ces résidents sont plutôt qualifiés (un quart d’entre eux est cadre), diplômés (deux tiers sont diplômés du supérieur) et relativement jeunes (un sur deux a entre 18 et 50 ans). Par ailleurs 20 % vivent seuls et 59 % vivent en couple (aussi souvent avec que sans enfant). Ces couples sont plus souvent binationaux. Six Britanniques travaillant en France sur dix ont un conjoint français. Les écoles et les universités de l’Ouest de la France accueillent de nombreux étudiants britanniques (Tarbes, Poitiers, Limoges, Angers, Caen, Rennes).
Les Britanniques, des acteurs importants sur le marché des résidences secondaires
Au-delà des 148 300 résidents britanniques, les habitants du Royaume-Uni sont nombreux à séjourner en France sur de plus courtes durées, que ce soit dans leur propre résidence secondaire ou en hébergement de tourisme. Ils possèdent 86 000 résidences secondaires en France et sont ainsi les plus nombreux parmi les propriétaires de l’étranger. Ils en détiennent notamment deux fois plus que les habitants de Belgique, d’Italie ou de Suisse. Dans le Sud-Ouest, 17 % des résidences secondaires sont détenues par des Britanniques. Ils en détiennent également un nombre important (8 600 logements) dans les zones touristiques des Alpes, où cette part atteint 6 %.
En 2018, les habitants du Royaume-Uni représentent la première clientèle étrangère dans les hébergements collectifs de tourisme de France métropolitaine que sont les hôtels, campings et autres hébergements touristiques. Ils ont passé au total plus de 19 millions de nuitées dans ces établissements, soit 14 % des nuitées en provenance de l’étranger. Suivent de près les clientèles allemande, néerlandaise (13 % chacune) puis belge (10 %). Cependant, les résidents du Royaume-Uni ont réduit leur fréquentation entre 2015 et 2018 (-7,5 % de nuitées), quand celles des touristes provenant de l’étranger augmentait (+6,7 %). Cette diminution de la fréquentation britannique affecte toutes les zones touristiques, mais plus particulièrement le massif Alpin (-29 %). La baisse est plus modérée dans l’espace urbain (-4 %), davantage fréquenté par une clientèle d’affaires, et les autres espaces plus ruraux. Le contexte économique et la dévaluation de la livre après le Brexit expliquent cette baisse de fréquentation.
Avec l’entrée en vigueur du Brexit, les Britanniques souhaitant s’installer en France devront disposer d’une carte de séjour (à partir du 1er janvier 2021 ou du 1er juillet 2021 pour les ressortissants britanniques déjà installés en France). Dans ces conditions, ils pourraient être, de ce fait, plus nombreux à demander la nationalité française. En 2016, 22 800 personnes habitant en France, nées avec la nationalité britannique, possédaient la nationalité française. Les demandes de naturalisation ont augmenté depuis trois ans.
Pour certaines régions, le Brexit pourrait donc avoir des conséquences non seulement sur la valeur des biens immobiliers mais aussi sur les dépenses de consommation. Dans des petites villes d’Aquitaine, les Britanniques ont contribué, ces dernières années, à la réouverture de commerces et de services de proximité. Entre les contraintes administratives et la perte de pouvoir d’achat générée par la dépréciation de la livre sterling, un manque à gagner devrait se faire ressentir.
Être jeunes en milieu rural en France
La population française est urbaine à 81 %. Les dix premières métropoles concentrent, à elles seules, 40 % de la population française. Le déclin de l’industrie a occasionné la fermeture de nombreuses usines qui se situaient bien souvent en milieu semi-rural. Malgré tout, selon l’INSEE, sur les 5 millions de jeunes âgés de 18 à 24 ans résidant en France, un quart habite dans une commune dite « rurale ». Rarement diplômés de l’enseignement supérieur et confrontés un fort taux de chômage, ils sont menacés de pauvreté et d’exclusion. Une proportion importante des jeunes de plus de 18 ans dont les parents habitent en milieu rural partent après l’obtention du BAC, soit pour poursuivre leurs études, soit pour trouver un emploi. Officiellement, 65 % des jeunes dont les parents vivent dans une commune rurale continueraient à y résider. Ce chiffre est néanmoins surévalué car les jeunes qui sont étudiants continuent à être rattachés au foyer fiscal de leurs parents. Néanmoins, les jeunes hommes sont plus nombreux à rester dans les communes rurales que les jeunes femmes (55 % d’hommes contre 45 % de femmes) quand en milieu urbain la parité est de mise. Cette surreprésentation des hommes s’explique par un taux d’échec scolaire plus élevé et par leur taux d’activité plus important dans certains secteurs présents en milieu rural (agriculture notamment). Les jeunes hommes s’émanciperaient plus tardivement que les jeunes femmes qui profitent de leurs études pour se domicilier en ville.
Les jeunes habitant en territoire rural visent, en règle générale, des études courtes. Ils sont, selon les services statistiques du Ministère de la Santé (DREES), 47 % à souhaiter atteindre au plus un bac+3 quand ils sont encore en cours d’études, contre 33 % chez les urbains. Moins d’un tiers pensent suivre un enseignement supérieur de plus de trois ans, contre 46 % chez les urbains.
Les 18-24 ans vivant en milieu rural sont plus nombreux à mettre en avant le caractère inutile et fastidieux des études. L’intérêt de l’enseignement ne leur paraît pas suffisant au regard des débouchés professionnels qu’il offre. En milieu urbain, moins de 20 % des jeunes se déclarent lassés par les études contre plus de 25 % en milieu rural.
Les jeunes ruraux sont plus souvent en emploi (36 %) que les jeunes urbains (29 %). Cet écart est avant tout lié à la poursuite ou non des études. En effet, parmi ceux qui ne sont pas en cours d’études, les jeunes sont aussi souvent en emploi en zone rurale qu’urbaine (62 % et 60 %). En milieu rural, toujours selon l’INSEE, l’accès à l’emploi des jeunes femmes est difficile. Cette situation explique en partie leur souhait de « partir à la ville ». Il y a un écart de 1 points pour le taux d’emploi entre les jeunes garçons et les jeunes femmes.
La solidarité familiale joue de manière plus importante en milieu rural qu’en milieu urbain mais elle est réservée aux hommes. 32 % des jeunes hommes en milieu rural ont, en effet, bénéficié d’une aide de leurs parents dans la recherche de leur premier poste, contre 23 % en milieu urbain. En revanche, les jeunes femmes rurales sont moins souvent aidées (21 %) et dans des proportions proches des urbaines (18 %). Cette différence s’explique notamment par la nature des emplois proposés.
Les jeunes vivant dans une commune rurale cohabitent totalement ou partiellement plus souvent avec leurs parents. Leur autonomie résidentielle intervient plus tardivement. En zone rurale, à 21 ans, seulement un jeune adulte sur dix ne vit plus avec ses parents (11 %), quand cette proportion s’élève à deux sur dix dans le cas des jeunes urbains (23 %). En revanche, à 24 ans, 49 % des jeunes ruraux ne vivent plus chez leurs parents, contre 43 % des urbains. Ce changement est déterminé par le fait que les jeunes ruraux sont plus souvent en couple et en emploi à ces âges quand les urbains achèvent leurs études entre 24 et 28 ans.
En moyenne, les jeunes ruraux perçoivent 815 euros par mois, ce qui est, de manière contrintuitive, plus élevée que les revenus des jeunes urbains (765 euros). Ces ressources se composent de revenus du travail (66 %), d’aides sociales (17 %) et d’aides parentales (17 %). Les revenus des jeunes urbains proviennent à 56 % des revenus du travail, à 19 % des aides sociales et à 25 % des aides parentales. Les jeunes ruraux travaillant plus tôt que les urbains, ce qui explique le différentiel de revenus en leur faveur.
32 % des jeunes ruraux perçoivent des aides sociales, contre 38 % des jeunes urbains. Cet écart s’explique par le plus faible rôle joué par les aides au logement et des bourses étudiantes en milieu rural.
En zone rurale, les 18-24 ans ont plus souvent des aides parentales en nature. 33 % des jeunes ruraux bénéficient régulièrement de services rendus par leurs parents, contre 24 % chez les urbains. Ils prennent par exemple plus souvent leurs repas chez leurs parents (13 % contre 11 %) ou reçoivent plus fréquemment une aide de leur part pour se déplacer. 12 % des jeunes ruraux ont besoin d’être conduits en voiture par leurs parents, contre 7 % des jeunes urbains qui peuvent plus aisément recourir aux transports en commun.
23 % des jeunes ruraux indiquent ne réaliser aucune dépense pour les loisirs. Pour la plupart des divertissements, ils déclarent moins fréquemment des dépenses que les urbains, sauf dans le cas de pratiques sportives (33 % pratiquent un loisir sportif payant contre 30 % des urbains). Les jeunes ruraux déclarent moins souvent avoir réalisé des dépenses pour des voyages ou des séjours à l’étranger : ils sont 19 % à avoir fait au moins un voyage au cours de l’année sur leur temps libre, contre 31 % chez les urbains. Les difficultés d’accès aux transports et le coût des voyages peuvent expliquer cette différence. La part des jeunes ruraux qui déclarent des dépenses en produits culturels est également moins élevée (42 % contre 49 %). 92 % des jeunes ruraux utilisent une voiture ou un deux-roues au quotidien, contre 75 % en milieu urbain. 77 % des jeunes ruraux obtiennent le permis entre 18 et 24 ans, contre 63 % en milieu urbain. 19 % des jeunes ruraux possèdent un abonnement aux transports en commun, contre 41 % chez les urbains. En zone rurale, la voiture est indispensable tant pour le travail que pour les loisirs.
Sur le plan de la satisfaction globale, la DREES ne constate pas, en revanche, de réelles différences. La proportion de 18-24 ans insatisfaits de la vie qu’ils mènent est identique en zone rurale et urbaine (17 %). Les jeunes ruraux sont moins sensibles que les urbains au sentiment de privation que ce soit en matière de vêtements ou de loisirs. Malgré tout, les jeunes femmes vivent moins bien que les hommes le fait de demeurer en milieu rural. 39 % de celles-ci déclarent subir au moins trois formes de privation, contre 25 % chez les hommes. Le moindre taux d’activité et une société plus masculine qu’en ville expliquent certainement cet écart.
La guerre de la 5G aura-t-elle lieu ?
Les sujets de tension avec la Chine se multiplient. Après la guerre commerciale sino-américaine de 2019, la polémique sur l’épidémie de Covid-19, l’indépendance de l’OMS, et Hong Kong, c’est au tour du déploiement de la 5G et du rôle dévolu à Huawei de donner lieu à un affrontement entre Occidentaux et les Chinois.
La technologie 5G est un nouveau standard de téléphonie permettant d’augmenter le nombre de connexions simultanées. Un million d’équipements au kilomètre carré, soit dix fois plus que la 4G, pourront être connectés. Elle offre également la possibilité de transmettre plus de données en moins de temps. Les débits sont ainsi multipliés par 1 000 et le temps de transmission réduit de 100 fois par rapport à la 4G. Cette technologie répond à de nouveaux besoins en lien aujourd’hui avec l’essor du clouding et des objets connectés et, demain, avec le développement des voitures sans conducteur. La 5G devrait favoriser la gestion à distance de nombreux objets ou robots. Associée à des techniques vidéos, elle devrait faciliter la télémédecine.
La Chine est aujourd’hui le pays le plus avancé en matière de diffusion de la 5G avec la Corée du Sud et le Japon. Plus de 100 millions de Chinois ont déjà souscrit un abonnement 5G. Huawei est devenue un des entreprises clef de cette technologie en proposant des serveurs et des antennes. Huawei symbolise la montée en puissance de la Chine non seulement dans les nouvelles technologies mais aussi au niveau commercial. Le chiffre d’affaires de cette entreprise atteint 125 milliards de dollars.
Huawei est accusée d’espionnage au profit des autorités chinoises. Les autorités américaines estiment que les équipements de cette entreprise permettraient à la Chine d’avoir des informations en directes, voire de contrôler des ordinateurs et des objets connectés. Elles considèrent également que les utilisateurs deviennent dépendants de la technologie chinoise qui est subventionnée et qui ne répond pas aux règles du droit de la concurrence.
Face à ces risques, les États-Unis ont reconduit un embargo adopté en 2019 jusqu’en mai 2021 limitant l’accès d’Huawei à certains semiconducteurs américains. Cette mesure s’ajoute à celle empêchant le fabricant chinois d’utiliser les services Google sur ses smartphones, comme le récent Huawei P40 Pro. La marque a pu entamer une stratégie au long cours pour contourner cet obstacle en misant sur ses propres Huawei Mobile Services et sur le magasin d’applications AppGallery. Pour les microprocesseurs, Huawei est en train de trouver d’autres producteurs en-dehors des États-Unis. Le Royaume-Uni a également annoncé son intention d’empêcher le recours aux matériels Huawei pour le réseau de 5G. La France a fait de même le mercredi 22 juillet. Douze États occidentaux devraient prochainement suivre les États-Unis, le Royaume-Uni et la France.
La Chine a annoncé des mesures de rétorsions vis-à-vis des États qui interdisent ou limitent les activités de Huawei. Ainsi, elle envisage d’imposer des sanctions à Lockheed Martin pour la vente d’armes à Taiwan. HSBC, une banque hong-kongaise et britannique pourrait faire l’objet de sanctions de la part de la Chine et des États-Unis. Pa ailleurs, plusieurs entreprises chinoises sont menacées de sanctions comme TikTok, une plateforme appréciée des jeunes. Elle fait l’objet d’une interdiction en Inde et, pourrait être prochainement également interdite aux États-Unis.
Cette guerre commerciale sur fond des technologies de l’information et de la communication est lourde de conséquences. Si la Chine est accusée de récupérer des informations sensibles avec ses antennes 5G et pourrait contrôler objets et terminaux connectés, ce reproche pourrait être également fait aux entreprises américaines comme Apple ou Google ainsi qu’à celles de l’Union européenne présentes sur ce marché (Nokia, Ericsson). Un engrenage protectionniste pourrait s’engager, entraînant des fractures au niveau des communications et provoquant une remise en cause des principes du commerce international. Le coût direct de l’extraction de Huawei des réseaux européens provoquerait une augmentation des coûts d’environ 1 % et un retard dans le déploiement de la 5G. Ericsson et Nokia, deux fournisseurs d’équipements équivalents ont déclaré pouvoir accélérer leur production.
Les mesures concernant Huawei s’ajoutent à d’autres qui traduisent bien un changement de climat, changement qui s’est accéléré avec la crise de Hong Kong. Face à la volonté de la Chine de banaliser le statut de ce territoire, le Congrès américain a adopté la loi sur l’autonomie de Hong Kong. Complété par un décret, ce texte a mis fin au traitement économique préférentiel dont bénéficiait le territoire. Toute exportation de technologies sensibles américaines vers le territoire sera également interdite. Des dirigeants chinois susceptibles d’avoir contribué à éroder l’autonomie du territoire pourraient être interdits d’entrer aux États-Unis. Certains prêteurs chinois pourraient être également interdits de négocier en dollars. Les États-Unis appliquent des sanctions comparables à celles instituées contre la Russie après le rattachement de la Crimée en 2014. Des mesures de rétorsions de la part de la Chine sont également attendues sur ce sujet. Ainsi, la Chine a accusé les États-Unis d’ingérence et a indiqué préparer des mesures de rétorsions.
Avant même la crise sanitaire, le protectionnisme progressait. Le tarif moyen sur le commerce sino-américain a été progressivement porté à 20 %. De leur côté, les flux d’investissements directs de la Chine vers l’Europe avaient diminué, en 2019, de 69 % par rapport au sommet de 2016. La guerre géopolitique engagée à l’encontre de la Chine est d’une nature toute différente de celle que l’Occident a mené après la Seconde Guerre mondiale avec l’URSS. En effet, la Chine est devenue la première puissance industrielle et commerciale au niveau mondial quand l’URSS était sur le plan économique un État de second rang. La Chine assure plus de 13 % des exportations mondiales et représente 18 % de la capitalisation boursière mondiale.
De plus en plus d’acteurs plaident pour une refonte des règles du commerce international, voire une refondation de l’Organisation Mondiale du Commerce. Certains demandent même la création d’une nouvelle organisation à laquelle ne participerait pas la Chine. Ils lui reprochent son capitalisme d’État, le subventionnement de nombreux secteurs et la manipulation du taux de change. Si la perte du statut de la nation la plus favorisée peut apparaître logique, son exclusion n’aurait plus beaucoup de sens sauf à vouloir instituer deux systèmes économiques étanches. L’Occident, au vu de son état politique économique et démographique, aurait plus à perdre qu’à y gagner. Il n’est pas certain que les pays émergents et les pays en développement acceptent d’isoler la Chine. D’autres revendications peuvent, en revanche, se justifier. L’ouverture du marché intérieur chinois, l’instauration de règles de gouvernance plus claires, une transparence réelle des relations commerciales et financières ainsi qu’une appréciation de la devise chinoise, constitueraient des avancées pour de nombreux acteurs du commerce international. L’application d’un code garantissant la sécurité des données générées par les technologies de l’information et l’indépendance des entreprises de ce secteur vis-à-vis du pouvoir sont également demandées.
La crise sanitaire et économique ainsi que les futures élections
américaines ne favorisent par l’élaboration d’un consensus. Les Américains
pensent que les Chinois ont plus à perdre d’une déstabilisation du commerce
international ; les premiers s’appuyant sur leur marché de consommation quand
les seconds dépendent des exportations. Malgré la volonté des pouvoirs publics,
la demande intérieure de la Chine n’a pas pris le relais des échanges comme
moteur clef de la croissance. Prudents, les Chinois maintiennent un taux élevé
d’épargne, plus de 40 % du revenu disponible brut qui freine la montée en
puissance de la consommation. Dans ce contexte, les autorités américaines
pensent obtenir des concessions de la part de la Chine. Cette dernière est, en
revanche, convaincue de sa nouvelle supériorité et elle a en mémoire les
affront des que les Occidentaux lui ont infligée à la fin du XIXe et
au début du XXe siècles avec les concessions étrangères.