9 janvier 2016

Le Coin des Tendances du 9 janvier 2016

 

La société du partage, du subi à esprit des temps nouveaux

 

La société du partage avec le développement des plateformes collaboratives est devenue, ces dernières années, à la mode. Dans un monde où les services dominent, la propriété des biens serait devenue moins importante que leur usage. La prise de conscience des problèmes environnementaux impose une consommation responsable limitant le gaspillage.

La société du partage n’est pas pour autant une invention issue d’Internet. Les prêts dans les bibliothèques, les vide-greniers, les puces, le troc… ne datent pas d’hier. Le recours au partage s’accroît durant les périodes de crise économique. Il tend à diminuer quand l’expansion revient. Avec Internet, les possibilités de partage se multiplient mais selon une récente étude du CREDOC les comportements restent les mêmes.

Plus des trois quarts des Français sont d’accord ou plutôt d’accord sur l’idée que l’usage d’un bien est bien plus important que sa propriété. Mais depuis deux ans, les pratiques d’usage partagé et de réemploi stagnent voire reculent légèrement. La proportion des ménages ayant déjà vendu un objet sur Internet est passée de 48 à 45 % de 2014 à 2015. De même, la proportion de ménages ayant déjà acheté un bien d’occasion ne progresse plus réellement. Les Français ont, avec l’amélioration de leur pouvoir d’achat en 2015, préféré revenir à la consommation de biens neufs. La consommation a progressé de plus de 1 % quand elle avait diminué en 2012 et qu’elle était restée stable en 2013 et 2014.

Les enquêtes soulignent que la contrainte budgétaire est le facteur déclenchant pour l’achat d’un bien d’occasion.

Les jeunes achètent davantage que leurs ainés des biens d’occasion. Certains affirment qu’ils sont plus en phase avec le principe du partage et de l’usage ; d’autres considèrent que la faiblesse de leurs revenus et les difficultés d’insertion expliquent ce recours plus important aux biens d’occasion. La colocation même si c’est devenu tendance est avant tout la conséquence de difficultés à trouver des logements abordables.

Si ce sont les personnes à revenus modestes qui achètent les plus de biens d’occasion, les vendeurs sont plutôt issus des classes sociales les plus élevées.

Le CREDOC a étudié les freins au développement du partage de biens. Les résultats traduisent que les comportements évoluent lentement.

L’attrait pour l’innovation reste fort chez les consommateurs. La pression des enfants, celle de l’entourage, incitent à acheter des biens récents.

Le neuf est un symbole social. Acheter une voiture neuve traduit toujours une certaine forme de réussite. Acheter de l’occasion, c’est un second choix, ce n’est pas un plaisir pour une très grande majorité de consommateurs. Il en est de même pour les vêtements. Acheter d’occasion, c’est régresser.

La durabilité est associée à l’achat neuf. L’occasion, c’est du dépannage, c’est pour gagner un peu de temps avant l’achat d’un bien neuf. Ce dernier permet d’accéder aux derniers progrès.

Acheter un bien neuf permet d’être indépendant, de ne pas dépendre des autres. Louer, emprunter un objet, réaliser un déplacement en co-voiturage instaure une relation de dépendance vis-à-vis d’autrui. Posséder une voiture, c’est posséder un espace personnel, une zone de sécurité.

 L’ère des métropoles

La réforme territoriale qui s’est traduite par la création des grandes régions fait la part belle aux métropoles. Ce choix n’est pas en soi nouveau. Il prolonge la politique qui avait été mise en œuvre dans les années 60 par la Délégation à l’Aménagement du Territoire avec la création des métropoles d’équilibre. Le point nouveau c’est que désormais le développement des métropoles ne répond plus à une logique de rééquilibrage de la province par rapport à Paris mais bien de doter la France de grandes métropoles capables de concurrencer leurs homologues européennes.

Les métropoles sont aujourd’hui considérées comme des moteurs de la croissance. Plusieurs études économétriques ont été réalisées pour étudier les impacts positifs et négatifs de la métropolisation du territoire. Certains considèrent que les effets d’échelle génèrent de véritables gains de productivité quand d’autres mettent l’accent sur les nuisances (pollution, embouteillages, insécurité, augmentation du prix du foncier) et sur les effets de destruction d’activités sur le reste du territoire.

La France est constituée de quatre ensembles. Dans le premier se situe la Région Parisienne qui représente, à elle seule, 27 % du PIB. Dans le deuxième, se trouvent les grandes métropoles (Lyon, Marseille, Lyon, Strasbourg, Bordeaux, Toulouse, Lille….) qui représentent un quart du PIB. Le troisième ensemble regroupe les aires urbaines de moindre importance (des agglomérations de 50 0000 à 200 000 habitants) ; enfin le quatrième qui rassemblent le territoire rural. La France est moins polarisée que d’autres Etats. Ainsi, aux Etats-Unis ; les six premières métropoles représentent 25 % du PIB, les 17 suivantes également 25 % quand les 85 suivantes pèsent aussi 25 % du PIB.

Les études économétriques confirment le rôle positif des métropoles sur la croissance. La densification des activités économiques est une source de gains de productivité tant par la multiplication des échanges qu’elle permet que par la concurrence qu’elle génère. Internet ne rend pas les territoires ruraux plus productifs. Il a, au contraire, favorisé les zones les plus peuplées. Les études empiriques démontrent qu’un doublement des activités sur un territoire donné accroît de 2 à 6 % les salaires et la productivité (étude Rosenthal – Strange 2004 et Combes – Lafourcade 2012). Si le nombre d’emplois augmente de 10 % sur un territoire donné, la productivité augmente de 0,2 à 0,5 %.

Les gains de productivité augmentent en parallèle avec l’amélioration des moyens de transports. Les études sur le Grand Paris parient sur un fort accroissement de la productivité. Plus le cœur est important, plus l’effet d’agglomération joue. Selon les travaux menés par plusieurs cabinets, le retour sur investissement pour le Grand Paris serait assez rapide au regard de « l’effet agglomération ».

La création des nouveaux axes de transports collectifs provoquant une valorisation de l’immobilier permet l’attraction d’une population plus dynamique. Elle permet l’installation de nouvelles entreprises, en règle générale, en développement car capables de supporter le coût d’un déménagement et faisant résolument le pari de la réussite des nouveaux quartiers. Ces nouveaux axes de transports facilitent les échanges en contribuant à générer plus de mobilité.

La métropole concentre un très grand nombre de services ce qui permet aux entreprises de réaliser des économies et de gagner du temps. L’accès à l’international est un atout indéniable.

La France souffre d’un manque de métropoles de rang international. Si l’agglomération parisienne avec ses 12 millions d’habitants appartient au cénacle des très grandes métropoles – tout en étant handicapée par son manque de structuration et par un cœur très étroit – les autres agglomérations ont du mal à concurrencer les grandes villes allemandes ou espagnoles.

Au niveau de la taille, la France n’a pas d’agglomérations ayant entre 2 et 10 millions d’habitants. Certes, le redécoupage territorial aboutit à la création de grandes régions dépassant les 2 millions d’habitants mais entre Tulles et Bordeaux, l’effet agglomération est assez virtuel. Il en est de même entre Charleville-Mézières et Strasbourg.

Le poids économique des métropoles est très variable. Orléans et Dijon ne jouent pas dans la même cour que Lyon. Marseille souffre de l’absence d’un arrière-pays et n’a pas su ou pu valoriser son rôle de port.

Peu de métropoles disposent d’une palette complète d’activités. Les agglomérations les plus diversifiées sont Lyon, Lille voire Bordeaux et Strasbourg. Toulouse est très centrée sur l’aéronautique quand Rouen dépend avant tout des raffineries et de l’agro-alimentaire.

Le rayonnement international constitue également un autre maillon faible de nos métropoles. Seules Paris et Nice ont des aéroports réellement internationaux. Lyon et Lille en étant positionnées à des carrefours de routes commerciales et à proximité de nombreux pays sont plus internationalisées que Rennes ou Nantes. Strasbourg qui s’est longtemps développée en opposition à la frontière allemande tout en étant coincée par les Vosges essaie de se construire un destin international. Orléans et Rouen sont trop près de Paris pour avoir des vies internationales autonomes. Toulouse est une ville ouverte sur l’extérieur mais du fait de la présence d’Airbus. En la matière, Marseille bénéficie de son port mais qui ce dernier a connu un long déclin.

L’autre point clef pour être une métropole digne de ce nom et générer des gains de productivités, c’est la présence d’établissements d’enseignement supérieurs et de centres de recherches reconnus. Si Paris est évidemment bien placée, c’est beaucoup plus difficile pour de nombreuses métropoles. En effet, Toulouse, Lyon, Strasbourg, Marseille en intégrant Nice constituent des pôles de recherche consistants.

Les métropoles françaises se doivent de prendre un nouvel essor afin d’abandonner leurs habits de super chef-lieu administratif. En effet, les capitales régionales ont longtemps vécu en s’appuyant sur l’emploi public. Avec la raréfaction des crédits publics, leur avenir dépendra de la force de leurs réseaux économiques.