16 janvier 2022

Le Coin des tendances – immobilier – streaming enfants – transition énergétique

L’augmentation des prix de l’immobilier at-elle une fin ?

L’indice mondial des prix des logements du FMI, exprimé en termes réels, est bien au-dessus du sommet atteint avant la crise financière de 2007-2009. En une génération, les prix ont été multipliés par deux en valeur réelle au sein de l’OCDE. Au Canada, à Halifax, la plus grande ville de la Nouvelle-Écosse, la progression depuis la fin de l’année 2019 est de 50 % selon Knight Frank, une société immobilière. Entre 2005 et 2021, les prix de l’immobilier ont augmenté de plus de 48 % au sein de l’Union Européenne et de plus de 40 % en France. Sur la dernière année, la hausse dépasse 7 % au sein de l’Union européenne. Elle est même de 16 % en Estonie ou de 11 % en Allemagne. Ces taux sont des moyennes, dans certaines villes ou quartiers, elles peuvent dépasser 20 %.

Cercle de l’épargne – données Eurostat

Si durant des années, la hausse des prix de l’immobilier était restée mesurée, depuis 2015, une accélération est constatée. De 2005 à 2021, elle atteint près de 70 %, ce qui reste deux fois plus faible que la hausse qu’a connue la Suède (+ 140 %).

Une exaspération croissante des populations face à l’augmentation des prix de l’immobilier

L’immobilier attire depuis des années les convoitises des investisseurs. Berlin qui se caractérise par une forte proportion de locataires (80 %) doit faire face à une crise du logement sans précédent. Jusque dans les années 2010, la capitale était réputée pour le montant modéré des loyers. La concentration de l’offre (promoteurs, établissements financiers) a provoqué leur augmentation entraînant un mouvement de contestation au sein de la population. Un référendum populaire a été organisé afin de demander la nationalisation des logements et l’éviction des investisseurs institutionnels. À Séoul, le prix de l’immobilier a augmenté de 70 % depuis 2017. Cette hausse a provoqué la défaite de l’équipe municipale sortante en 2021.

Au Canada, des propositions visant à interdire l’achat par des non-résidents de biens immobiliers sont à l’étude. En France, des élus insulaires sont également favorables à une telle mesure. En Suède, en juin, le gouvernement n’a pas été reconduit notamment parce qu’il avait proposé de laisser le marché jouer un plus grand rôle dans la détermination des loyers, et refusé de le réguler. À Berlin, la Cour constitutionnelle a invalidé la loi de plafonnement des loyers promulguée par la municipalité mais des militants qui avaient rassemblé suffisamment de signatures ont demandé la tenue d’un référendum sur la saisie de logements appartenant à de grands propriétaires privés. En réaction, la municipalité a récemment annoncé que, dans le but d’augmenter l’offre, elle allait acheter près de 15 000 appartements à deux grandes sociétés immobilières pour la somme de 2,46 milliards d’euros. Selon le centre de réflexion britannique « Center  for Cities », une partie du vote en faveur du Brexit en 2016 s’explique par le coût croissant de l’immobilier au Royaume-Uni qui oblige des Britanniques à migrer de plus en plus loin en périphérie des grandes villes.

Un nombre croissant de logements du centre des grandes agglomérations et des zones littorales était, avant la crise sanitaire, loués en saisonnier via les plateformes réduisant l’offre des locations traditionnelles. Plusieurs villes ont tenté de limiter cette pratique en imposant des taxes ou obligeant les propriétaires à effectuer des compensations.

L’immobilier, victime d’une bulle ?

Dans son dernier rapport sur la stabilité financière, le FMI a averti que « les risques de baisse des prix des logements semblent être importants », et que, s’ils devaient se matérialiser, les prix dans les pays riches pourraient chuter jusqu’à 14 %. Aux États-Unis, le prix des maisons est supérieur d’un tiers à leur plus haut niveau d’avant la crise des subprimes, et devrait encore augmenter, selon Goldman Sachs de 16 % d’ici  la fin de 2022 aux États-Unis. Selon UBS, en Europe, à Hong Kong, et dans plusieurs villes canadiennes comme Toronto ou Vancouver, « le risque d’une bulle s’accroît ». Francfort figurerait en tête de liste des villes européennes ayant le marché immobilier le plus déséquilibrés, selon l’indice mondial des bulles immobilières d’UBS publié le 13 octobre 2021.  En Nouvelle-Zélande, où les prix ont augmenté de 24 % l’année dernière, la banque centrale juge cette évolution dangereuse. La remontée de son taux directeur, en octobre dernier, n’a pas pour le moment, calmé les ardeurs. Les prix de l’immobilier continuent également d’augmenter en République tchèque, même si la banque centrale a relevé ses taux à plusieurs reprises en 2021. En France, il est trop tôt pour apprécier les conséquences du durcissement des conditions par le Haut Conseil de la Sécurité financière qui sont entrées en vigueur le 1er janvier 2022.

Des inflexions qui ne changent pas la donne

Avec la crise sanitaire, des inflexions sont constatées en Europe avec une moindre augmentation des prix dans les grandes capitales et une préférence marquée pour les agglomérations de taille moyenne et les villes en bord de mer. En France, dans les régions, les prix augmentent fortement quand ils sont orientés à la baisse à Paris.

Les facteurs de hausse demeurent

Plusieurs facteurs contribuent à la hausse du prix des logements. Les bilans des ménages restent robustes et leur l’appétence à dépenser plus pour améliorer leurs conditions de vie, la pénurie de l’offre du fait de la raréfaction du foncier, le coût croissant de la construction avec l’application des normes environnementales et les contraintes d’approvisionnement participent à cette hausse. Trois facteurs se distinguent néanmoins :

  • Les ménages aisés et déjà propriétaires de logements dans les grandes agglomérations alimentent la montée des prix. Ils contribuent à générer des phénomènes d’exclusion sur certains territoires. Les migrations en provenance des grandes métropoles vers les villes du littoral ou vers les villes de taille moyenne provoquent des hausses de prix empêchant les résidents locaux de trouver des logements correspondant à leurs revenus. Ce phénomène devient un problème social en Bretagne, en Corse ou à Bordeaux. Les faibles taux d’intérêt avantagent ceux qui disposent d’un apport, d’un capital à mobiliser. Ils favorisent l’augmentation des prix plus qu’ils ne rendent l’immobilier accessible aux primo-accédants. Aux États-Unis, les acquéreurs sont moins vulnérables à la hausse des taux d’intérêt, du fait qu’une large majorité des prêts est à taux fixe. Par ailleurs, les prêts hypothécaires sont moins pratiqués en 2021 qu’en 2007. Au Royaume-Uni, presque toutes les nouvelles hypothèques sont à taux fixe, les accords sur cinq ans étant désormais plus courants. Selon UK Finance, un organisme professionnel, près des trois quarts de tous les emprunteurs hypothécaires ne seront pas affectés à court terme par la récente hausse des taux de la Banque d’Angleterre. Le fort taux d’épargne surtout parmi les 20 % des ménages les plus aisés facilite également l’achat de biens immobiliers et donc la hausse de leur prix.
  • L’évolution des préférences est la deuxième raison pour laquelle les prix mondiaux des logements peuvent rester élevés. De plus en plus de personnes travaillent à distance, ce qui signifie une demande accrue de bureaux à domicile. D’autres veulent de plus grands jardins. Cette course à l’espace explique environ la moitié de la hausse des prix des logements britanniques pendant la pandémie, selon l’analyse de la Banque d’Angleterre. Les transactions portant sur des maisons individuelles ont par exemple augmenté, tandis que celles portant sur des appartements ont diminué.
  • Les politiques de protection de l’environnement aboutissent dans tous les pays avancés à la réduction du foncier disponible pour la construction. Par ailleurs, le coût croissant de cette dernière n’incite pas les promoteurs à se lancer dans des opérations importantes. La multiplication des recours en matière de construction qui allonge les délais et augmente les coûts est également dissuasive. De manière plus conjoncturelle, les pénuries de matériaux et de main-d’œuvre contribuent à l’augmentation des prix de l’immobilier. Les constructeurs sont confrontés à des coûts et des retards plus élevés pour les matières premières telles que le ciment, le cuivre, le bois et l’acier, et doivent faire face à la pénurie de gens de métier ce qui fait augmenter les salaires. Les bénéfices exceptionnels et l’amélioration des marges de certains constructeurs de maisons suggèrent que bon nombre d’entre eux ont été en mesure de répercuter les augmentations de coûts sur les acheteurs. DR Horton, le plus grand constructeur de maisons aux États-Unis, a déclaré que le prix de vente moyen de ses maisons avait augmenté de 14 % en 2021, contribuant à une croissance de 78 % du bénéfice par action.

Certains goulots d’étranglement de l’offre pourraient néanmoins s’atténuer. En octobre, le FMI a noté que les mises en chantier mondiales de logements avaient commencé à se redresser, bien qu’elles soient encore « considérablement en deçà des niveaux du début des années 2000 ». Selon les chercheurs de Freddie Mac, qui finance une grande partie du financement hypothécaire américain, le déficit de logement aux États-Unis serait de 3,8 millions en 2021, contre 2,5 millions en 2018. D’autres estimations mettent le manque à gagner plus près de 5,5 millions. En Angleterre, 345 000 nouveaux logements par an seraient nécessaires pour répondre à la demande. En France, le déficit serait de près de 200 000 par an.

Comment financer et réussir la transition énergétique ?

Les investisseurs plébiscitent les valeurs boursières ayant un lien avec la transition énergétique. Tesla en est la meilleure preuve, son action s’étant appréciée de 50 % en 2021. La valorisation de cette entreprise est la première de son secteur. S’élevant à plus de 1 000 milliards de dollars, elle représente près de quatre fois celle de Toyota. Cette dernière produit 10 millions de véhicules par an, contre 750 000 pour Tesla. Toute la filière de la voiture propre profite de l’engouement des investisseurs. Le cours de l’action de Catl, un fabricant chinois de batterie, a connu, l’année dernière, une hausse de 68 %. Cette priorité donnée à la transition énergétique par les investisseurs ne saurait suffire à répondre aux besoins.  Pour atteindre zéro émission nette d’ici 2050, les investissements dans l’énergie et dans les transports devront plus que doubler, pour atteindre 5000 milliards de dollars par an, selon l’OCDE, à l’échelle mondiale.

L’affectation de l’épargne en faveur de la lutte contre le réchauffement climatique n’est pas toujours bien fléchée. La mode étant au « vert », les labels ont tendance à se multiplier. Certains gestionnaires peuvent mettre en avant des arguments écologiques qui ne se traduisent pas dans la politique de placement. Sur ce sujet, l’Union européenne a élaboré un nouveau système d’étiquetage, ou taxonomie, qui trie l’économie en activités qu’elle juge écologiquement durables, de l’installation de pompes à chaleur à la méthanisation des boues d’épuration. L’idée est que les fonds et les entreprises utiliseront ces critères pour mentionner la part de leurs activités considérée effectivement vertes, et cette clarté aidera à libérer un flot de capitaux des marchés. En vertu de cette classification, l’énergie nucléaire a été classée comme « verte » sous réserve de conditions concernant le traitement des déchets. Cette classification a donné lieu à une opposition en particulier en Allemagne qui a décidé de fermer ses centrales nucléaires. Le classement du gaz donne lieu également à un débat en Europe. Pour certains, la combustion du gaz émet des gaz à effet de serre quand d’autres estiment qu’il constitue une énergie de transition du carboné vers le non-carboné.  Au nom de cette théorie, les investissements en faveur du gaz peuvent être considérés comme « verts » au cours de la prochaine décennie à condition qu’’ils remplacent des combustibles fossiles plus polluants et qu’ils intègrent des plans pour passer à des sources d’énergie plus propres d’ici 2035. Le plan européen est séduisant mais est de nature bureaucratique et statique. Des investisseurs peuvent trouver intérêt à acquérir des entreprises polluantes et à engager des processus de décarbonation, ce qui leur permet à ce titre de récupérer des crédits carbone. Au sein de la zone euro, la BCE travaille à l’élaboration de test de résistance verte pour les banques pour mettre en adéquation leur bilan avec les objectifs de la transition énergétique même si la durée de vie de leurs actifs est plus courte que l’horizon du changement climatique le plus dévastateur. Par ailleurs, la BCE étudie la possibilité d’effectuer à des rachats d’obligations d’État dites vertes pour faciliter le financement de la transition énergétique. En l’état, ces rachats dépassent les missions qui lui sont dévolues.

Afin d’accentuer la pression sur les entreprises, les investisseurs devraient avoir les moyens de suivre plus facilement les émissions de carbone de leurs portefeuilles. Des fonds à zéro émission seraient vertueux, mais ceux qui réduisent rapidement leur empreinte pourraient l’être encore plus. Cela suppose des obligations déclaratives plus poussées qui ne sont pas appréciées par les acteurs économiques. L’objectif plus large de l’Union européenne serait d’utiliser la tarification du carbone pour agir sur l’allocation du capital. Mettre un prix sur le carbone envoie un signal qui atteindrait l’ensemble de l’économie, pas seulement les entreprises cotées. Le système de tarification du carbone de l’Union Européenne est le plus important à l’échelle mondiale. Cependant, il ne couvre pour le moment que 41 % des émissions. Des travaux sont en cours pour l’étendre. Par ailleurs, il faudrait prévoir une interconnexion avec les autres marchés carbone voire l’instauration d’un marché international qui pourrait être organisé par l’Organisation Mondiale du Commerce pour éviter toute suspicion de protectionnisme déguisé.

Les enfants, une cible rentable pour les acteurs du streaming vidéo

Selon une étude de Parrot Analytics, une entreprise de données américaine, la demande de vidéos pour les enfants a, depuis le début de la pandémie, augmenté de plus de 50 % quand la progression n’est que de 23 % pour les autres catégories de vidéos. La demande d’émissions éducatives et distractives est en forte progression. Les mesures sanitaires restrictives ont évidemment accéléré la digitalisation des activités des jeunes enfants. L’offre en streaming est apparue insuffisante et parfois de qualité médiocre. Pour une majorité des Américains, les contenus pour enfants seraient, par ailleurs, souvent inadaptés voire dangereux. Ils pointent en premier lieu les messages liés à l’alimentation et ceux liés à la sexualité. La demande de programmes dits respectueux est forte. Si les grands acteurs du streaming mobilisent de nombreux créateurs, ils investissent surtout pour concurrencer TikTok. Le développement d’un segment « jeunes » pour les applications de vidéo s’impose car il est générateur de recettes récurrentes. Les émissions de télévision pour enfants, en particulier les émissions d’animation, coûtent, en outre, moins chères à produire que les divertissements pour adultes. Ils ont également tendance à avoir une durée de conservation plus longue, le public se renouvelant naturellement. Par ailleurs, la programmation pour enfants donne lieu à de nombreuses possibilités de marchandising.

Afin de concurrencer Disney et Sony, les autres majors de l’image multiplient les initiatives dans la création de vidéos pour les jeunes. Netflix a ainsi acquis pour plus de 700 millions de dollars Roald Dahl Story Company qui détient les droits de contes comme « Charlie et la chocolaterie ». En novembre, ce même réseau a annoncé le lancement de Kids Clips, qui propose de courtes vidéos sélectionnées à destination des enfants. HBO Max, a lancé, en novembre, Cartoonito, un portail dédié aux émissions préscolaires. Plusieurs start-ups se spécialisent aux États-Unis dans la création de contenus pour les jeunes.