13 février 2021

Le Coin des tendances, la révolte des actionnaires – l’Afrique

La révolte des petits actionnaires a-t-elle sonné ?

Le cours de l’action GameStop est passé de quelques dollars à 480 dollars en quelques jours avant de redescendre autour de 80 dollars. Pendant quelques heures, la capitalisation de ce fournisseur de jeux vidéo a ainsi atteint 30 milliards de dollars quand, en 2020, elle ne dépassait pas 200 millions de dollars. Cette folle envolée a été alimentée par une armée de petits actionnaires dont certains ont perdu des sommes conséquentes. En janvier, les investisseurs particuliers représentaient un quart du volume des transactions aux États-Unis, contre 10 % en moyenne en 2019.

Les actions jusque dans les années 1970 étaient sur des supports papiers. Les achats en bourse devaient s’effectuer par l’intermédiaire d’agents de change ou des coutiers et donnaient lieu à des commissions. La cotation n’était réalisée que quelques heures par jour. À Paris, la communication des cours était réalisée par la société La Cote Bleue qui en avait le monopole. Avec la mutation des marchés financiers, les titres ont été dématérialisés et les opérations de vente et d’achat s’effectuent en temps réel. Les transactions à haute fréquence permettent de les réaliser en moins de 100 millisecondes. L’essor de la sphère financière a fait sortir les petits actionnaires du champ de vision les petits épargnants. Ceux-ci étaient contraints de passer par un établissement financier ou par un fonds pour accéder aux marchés. Les actionnaires individuels avaient tendance à disparaître. L’affaire GameStop a été perçue, à tort ou à raison, comme la révolte des oubliés des marchés. D’autres opérations obéissant à la même logique ont également concerné les marchés des matières premières dont celui de l’argent.

L’affaire GameStop

GameStop qui contrôle 7 000 magasins de jeux vidéo dont ceux de la marque Micromania – présente en France –, est une société en difficulté du fait du développement du jeu en ligne. Plusieurs fonds spéculatifs dont Melvin Capital et Citron Research, ont, au vu de l’évolution du marché, joué à la baisse les actions de cette entreprise dans le cadre d’opérations à découvert. 150 000 investisseurs individuels dans le cadre du forum WallStreetBets du réseau communautaire américain Reddit ont décidé, pour s’opposer à ces fonds, d’acheter les actions de GameStop générant une forte hausse de son cours et mettant en danger les fonds précités. Ces derniers ont été contraints d’abandonner leurs positions sur GameStop, après avoir sollicité l’appui d’autres fonds pour combler leurs pertes. D’autres opérations ont été menées, toujours pour contrarier des fonds sur des entreprises ou sur le marché, par exemple de l’argent.

L’opération GameStop a été rapidement présentée par certains comme une nouvelle lutte de David contre Goliath. Pour d’autres, elle serait l’équivalent des « gilets jaunes » appliqués au monde de la bourse. Elle symboliserait ainsi la prise de pouvoir des petits actionnaires sur les fonds spéculatifs, accusés de vouloir provoquer la faillite de GameStop. La réalité est moins manichéenne. Au départ de ce combat, deux milliardaires, Ryan Cohen et Donald Foss ont initié le mouvement des petits actionnaires. Après avoir racheté, à eux deux, plus de 15 % du capital, ils ont obtenu des sièges au Conseil d’administration afin de restructurer l’entreprise. Ils avaient tout à gagner du départ des fonds spéculatifs. Par ailleurs, d’autres fonds ont profité de ce mouvement pour réaliser quelques belles plus-values. Figurent dans cette catégorie, les fonds Senvest et Morgan Stanley Institutional Inception. Enfin, Citadel Securities, chargé de passer les ordres sur les marchés, a réalisé une belle opération en encaissant des commissions sur les ordres d’achat.

Si le mouvement de révolte s’est arrêté, ce serait en raison de la puissance du lobby de la finance qui aurait convaincu l’administration de Wall Street de ramener à la raison les petits actionnaires. Le processus de rachat des actions aurait été freiné afin de sauver les Hedge Funds. Robinhood (Robin des bois), la plateforme de trading utilisée par les petits actionnaires, a effectivement limité leurs achats, mais uniquement par manque de liquidités, ces liquidités devant servir de garantie pour faire face aux risques pris par ses clients.

Une nouvelle ère pour la finance ?

L’affaire GameStop marque l’influence grandissante des réseaux sociaux dans la sphère financière. Ces dernières années, les marchés financiers, les investisseurs ont dû prendre en compte le poids croissant des Organisations Non Gouvernementales, en particulier celles qui interviennent dans les domaines de la protection de l’environnement ou de la parité. Certaines acquièrent des actions afin de pouvoir être présentes au moment des Assemblées générales et poser des questions aux dirigeants. Dans le cas de GameStop, ce sont des internautes participant à des forums qui ont tenté d’influer sur la vie d’une entreprise. Cette action concertée n’est pas aussi révolutionnaire qu’il n’y paraît. Au XIXe et au début du XXe siècle, la presse a révélé plusieurs scandales financiers comme l’affaire Stavisky. Jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, les journaux financiers influençaient les épargnants, contribuant ainsi à des phénomènes spéculatifs.

Le retour des actionnaires individuels ?

Le renouveau de l’actionnariat individuel est avancé comme facteur pouvant inverser les rapports de force. Aux États-Unis, les actionnaires particuliers n’étaient qu’à l’origine de 7 % des volumes échangés sur les marchés « actions », contre 20 % aujourd’hui. En France, leur nombre a baissé de manière constante des années 2000 après l’éclatement de la bulle Internet jusqu’en 2019. Il serait passé de 7 à 3,5 millions. Le succès de la privatisation de la Française des Jeux qui a conquis 450 000 actionnaires ainsi que la baisse du rendement des produits de taux, ont conduit à inverser cette tendance. En 2020, l’Autorité des Marchés Financiers a souligné que, au moment de la chute des cours en mars/avril, 150 000 actionnaires particuliers ont acheté des actions. Sur l’ensemble de l’année, 1,34 million de particuliers ont passé un ordre d’achat ou de vente sur des actions, 400 000 le faisant pour la première fois depuis plus de deux ans. Les actions attirent une nouvelle clientèle, plus jeune, plus connectée. Les moins de 35 ans ouvrent des comptes en ligne pour passer des ordres d’achat et de vente. Ils sont adeptes des fonds indiciels, les ETF. En 2020, le nombre de particuliers ayant acquis de tels fonds a augmenté de 33 %. En deux ans, la hausse est de 60 %

Des innovations technologiques mises au service de l’agit-prop 

La possibilité d’influer sur le cours des actions en opérant des achats simultanés a été facilitée par la diminution voire la gratuité des transactions, comme le propose le courtier en ligne Robinhood, en contrepartie de l’exploitation des données recueillies auprès de ses clients. Le recours aux données en s’appuyant sur des algorithmes peut donner des idées à des groupes d’actionnaires voire des activistes de toute nature pour créer des mouvements spéculatifs. Les techniques qui étaient avant l’apanage des traders professionnels tendent à se démocratiser. Cette évolution génère des risques de déstabilisation, risques qui sont accrus par la possibilité pour des hackers de s’infiltrer dans les systèmes de gestion des actifs.

À défaut de régulation, la perturbation des marchés s’intensifiera tant par la multiplication d’actionnaires individuels que par le recours par les professionnels de techniques sophistiqués. Des modèles informatiques peuvent ainsi regrouper des paniers d’actifs illiquides et évaluer des actifs similaires mais non identiques, élargissant ainsi l’univers des actifs pouvant donner lieu à des échanges. Le marché des obligations et celui de l’immobilier pourraient connaître de profondes évolutions afin d’accélérer le processus de rotation des portefeuilles.

Des innovations rapides ou l’arrivée de nouveaux acteurs provoquent fréquemment des crises financières d’autant plus quand le montant des liquidités augmente à très grande vitesse. Le krach de 1987 était le fruit de l’automatisation des opérations sur les marchés. La crise de 2008 est celle de la titrisation des crédits immobiliers. Les règles relatives aux opérations d’initiés et aux manipulations doivent également être modernisées pour faire face aux nouveaux flux d’informations, vraies ou fausses. L’accélération des échanges suppose également une adaptation des règles de trésorerie, en particulier aux États-Unis.

L’affaire GameStop pourrait-elle se produire en France ?

Pouvons-nous imaginer des activistes en suffisamment grand nombre acheter des actions ? Pour influer sur le cours des actions, il suffirait, en pratique, de quelques milliers d’actionnaires décidant d’agir ensemble. Ce n’est pas pour le moment dans la tradition française. Les forums sur des plateformes d’informations financières ne sont pas des lieux d’agitation mais plutôt d’information et de conseil, les investisseurs commentent les résultats des entreprises, comparent les offres tarifaires des courtiers, échangent des idées de placement.

L’arrivée de nouveaux actionnaires, plus jeunes, plus connectés souhaitant réaliser des plus-values rapides, est néanmoins constatée en France comme dans le reste de l’Europe. La progression du cours de l’action Tesla ou du bitcoin donne des idées d’enrichissement rapide. En France, les courtiers en Bourse ne proposent pas des services gratuits. Le niveau des ventes à découvert est bien plus élevé outre-Atlantique qu’en Europe. À New York, 100 % du flottant d’une société peuvent être vendus à la baisse.

L’essor du numérique et des réseaux sociaux déstabilisent de nombreux secteurs. La finance n’y échappe pas. Il en découle une nécessaire adaptation de la réglementation pour éviter des manipulations de courts et des opérations de pures spéculations. L’évolution du cours du bitcoin capable de passer de 8 000 à 45 000 dollars en quelques mois, est également une source d’interrogation sur le fonctionnement des marchés et le comportement de ses acteurs.

L’Afrique et la Covid-19, des tensions à prévoir

En 2019, l’Afrique comptait 1,3 milliard d’habitants. L’âge médian était de 20 ans, contre 42 ans en Europe. En Afrique, 41 % de la population avait moins de 15 ans quand ce taux était de 15 % au sein de l’Union européenne. Face à l’épidémie de Covid-19, la jeunesse de la population africaine constitue un atout, tout comme l’expérience acquise ces dernières années en matière d’épidémie. Si la jeunesse a permis au continent de passer relativement bien le cap de la première vague, il semble que la situation se soit, depuis, compliquée notamment avec la diffusion en son sein du variant sud-africain qui est plus contagieux et qui toucherait davantage les jeunes. En Afrique du Sud, 132 000 décès imputés à la Covid-19 ont été recensés depuis le mois de mai ; ce pays enregistre un taux de létalité plus élevé que celui enregistré dans les pays d’Europe occidentale. La situation tend également à se détériorer dans plusieurs pays subsahariens comme au Sénégal où les hôpitaux seraient en tension et feraient face à des pénuries de matériels. Le coronavirus, type sud-africain, progresse également très rapidement en Côte d’Ivoire. Les autorités craignent une explosion épidémique avec une transmission aux personnes âgées par les jeunes. Plusieurs foyers donnant lieu à de nombreux décès ont été recensés au Gabon.  Des experts estiment que le nombre de cas est plusieurs fois plus élevé que les décomptes officiels. La réalité de l’épidémie serait masquée par le peu de fiabilité des outils statistiques. La multiplication des nombreux foyers d’infection et la faiblesse des moyens dégagés pour la vaccination sont deux risques majeurs pour l’économie africaine qui demeure très fragile malgré les forts taux de croissance de ces dernières années.  

Le retour des problèmes économiques

Au début de la pandémie, l’Afrique a semblé bien résister. Le PIB de l’Afrique subsaharienne a baissé de 2,6 % en 2020, contre 3,5 % pour l’ensemble du monde. Sur les 24 pays qui ont enregistré une croissance positive en 2020, 11 se trouvaient en Afrique subsaharienne. Avec la diffusion du variant sud-africain et le reconfinement de nombreux États occidentaux, la situation économique se détériore nettement.

Ces dernières années, l’envolée des cours des matières premières avait contribué à l’accélération de la croissance. La proportion d’Africains extrêmement pauvres est passée de 56 % en 2003 à 40 % en 2018. De 2000 à 2014, le PIB de l’Afrique subsaharienne a augmenté presque deux fois plus vite que sa population. Les pays qui dépendent moins de l’extraction ou du pompage du pétrole, comme le Bénin, l’Éthiopie, la Côte d’Ivoire, le Kenya et le Sénégal, comptent parmi les économies à la croissance la plus rapide au monde. En 2020, pour la première fois en vingt-cinq ans, le PIB de l’Afrique subsaharienne a baissé. Avec une augmentation de la population de 2,7 % par an, soit environ deux fois le rythme de l’Asie, l’Afrique a besoin d’une croissance élevée pour réellement améliorer le niveau de vie de ses habitants. Avec l’épidémie de Covid-19, les pays africains ont été confrontés à la baisse de la demande en matières premières, à la disparition des flux touristiques et à la réduction des flux de capitaux. Quelque 32 millions d’habitants de l’Afrique subsaharienne sont tombés dans l’extrême pauvreté (gagnant moins de 1,90 dollar par jour), effaçant cinq années de progrès contre le besoin, selon la Banque mondiale.

Les pays qui dépendent du tourisme connaissent une forte chute de leur croissance. Ainsi, en 2020, le PIB de l’Île Maurice a baissé de 12,9 %, celui des Seychelles de 15,9. L’économie du Botswana, qui est connu pour ses réserves sauvages, s’est contractée de près de 10 %. Les réservations internationales dans les camps du delta de l’Okavango ont chuté de 95 %.

La chute du cours du pétrole en 2020 a touché les pays africains producteurs. Leur économie s’est contractée en moyenne de 4 %, contre 0,4 % chez les importateurs de pétrole (hors Afrique du Sud). En Angola, deuxième producteur de pétrole d’Afrique subsaharienne, les prix de l’immobilier à Luanda, l’une des villes les plus chères du continent, ont chuté brutalement. Le Nigéria, premier producteur de pétrole du continent et qui abrite un cinquième des Africains subsahariens, est confronté, selon la Banque mondiale, à une «crise sans précédent». Le nombre de personnes vivant en-dessous du seuil de pauvreté pourrait atteindre 100 millions, soit la moitié de la population. Avant la crise, ce nombre était de 20 millions.

L’Afrique du Sud qui était dans sa deuxième récession en deux ans avant la pandémie, en raison de la faiblesse des prix des produits de base, de la corruption, des coupures d’électricité et de la rareté des investissements a enregistré, en 2020, une diminution de 7,8 % de son PIB, le taux de chômage y dépassant les 30 %.

La situation économique devrait continuer à se dégrader sur le continent cette année. Les États africains qui ne bénéficieront pas ou peu de vaccins devront faire face à des problèmes de financement au moment où les flux de capitaux se tariront compte tenu des besoins en Occident et en Asie.

Les conséquences sociales sont multiples dans des États où la protection sociale demeure faible. En outre, le système éducatif est mis à rude épreuve depuis le début de l’épidémie. Les établissements scolaires subsahariens ont été totalement ou partiellement fermés pendant 23 semaines, soit bien plus longtemps que la moyenne mondiale. Comme plus de la moitié des Africains ne bénéficient ni de l’électricité, ni de connexion Wi-Fi, l’apprentissage à distance est plus que difficile. La modélisation de la Banque mondiale suggère que les cours déjà abandonnés coûteront près de 500 milliards de dollars de revenus futurs, soit près de 7 000 dollars par enfant. La pandémie pourrait mettre un terme au processus d’alphabétisation. Les femmes seraient les principales victimes de l’arrêt des cours.

Les États africains s’organisent

Comme sur les autres continents, les États africains réagissent pour limiter les effets de la crise. 46 pays subsahariens ont adopté des politiques de protection sociale, telles que les transferts monétaires ou l’électricité gratuite. La pandémie incite, en Afrique comme ailleurs, à la numérisation des activités. L’Éthiopie a adopté une loi donnant force juridique aux documents électroniques. Le Togo a émis des paiements sociaux en recourant aux smartphones.

Les pays africains souhaitent développer la coopération au sein du continent. Entrée en vigueur le 1er janvier 2021, la zone de libre-échange continentale africaine devrait ainsi faciliter les échanges, en particulier pour le secteur manufacturier. Des initiatives ont été prises afin de pourvoir les États en matériels de santé qui font défaut, dont les masques et les appareils de réanimation.

Le problématique accès aux vaccins

Les États africains doivent faire face à la pénurie de vaccins dans des proportions bien plus importantes qu’en Occident. Dans le cadre de la Covax, un programme mondial de vaccination financé par des Fondations et des organisations publiques internationales, les gouvernements tentent d’obtenir suffisamment de doses pour vacciner 20 % des habitants des pays pauvres d’ici la fin de cette année. L’Union africaine a obtenu séparément 670 millions de doses de vaccin Pfizer, Johnson & Johnson et Astra Zeneca permettant de vacciner, en plus,  25 % de la population. Les autorités africaines estiment que 60 % de la population africaine pourrait être vaccinée avant la fin de 2022, soit un an après les Occidentaux. Selon The Economist, l’immunité par le vaccin ne sera pas obtenue en Afrique avant 2024. Ce délai est jugé problématique compte tenu de l’évolution du virus qui a une capacité importante à muter. Les voyageurs et les touristes qui contribuent à générer près de 9 % du PIB resteront à l’écart.

La question de l’effacement de la dette africaine

Les pays d’Afrique doivent faire face à une dette publique croissance. Elle est passée de 62 à 70 % du PIB de 2019 à 2020. Cette hausse peut être jugée modeste au regard de l’évolution constatée dans les pays de l’OCDE. Les États africains ne disposent pas des mêmes marges de manœuvre. Ils ont dépensé en moyenne 3 % du PIB pour soutenir leur économique quand les États de l’OCDE y ont consacré de 7 à 10 % de leur PIB. Les pays africains ne bénéficient pas de la baisse des taux sur leurs dettes qui est souscrites auprès d’investisseurs étrangers. Le recours à la monétisation des dettes est difficile car il provoque une dépréciation de la valeur de la monnaie et rend onéreuses les importations. De peur de mettre en danger leur stabilité macroéconomique, seulement la moitié des États africains ont réduit les taux d’intérêt. Pour faire face aux besoins liés à la pandémie, les dépenses d’infrastructures ont été réduites dans de nombreux pays contribuant à l’augmentation du chômage.

Le FMI estime que de nombreux pays africains rencontreront des problèmes de financement de leurs dettes d’ici 2023. Les gouvernements subsahariens consacrent en moyenne plus de 30 % des revenus qu’ils perçoivent au paiement des dettes. Plus de la moitié des pays subsahariens à faible revenu sont en surendettement. En janvier, l’agence Moody’s a souligné les risques auxquels sont confrontés cette année la Zambie, le Ghana et l’Éthiopie, en particulier. La situation est en revanche plus contrôlée au sein des deux grandes économies du continent, le Nigéria et l’Afrique du Sud. Les dettes du Nigéria sont relativement faibles, mais le pays ne dispose pas de réserve des changes. En raison d’une manipulation du cours de sa devise, le pays connait une forte inflation et pourrait être confronté à une crise de la balance des paiements. En Afrique du Sud, la dette publique est émise en monnaie locale et est détenue par des emprunteurs locaux. Le service de la dette absorbe néanmoins plus de 30 % des ressources fiscales du pays.

43 % de la dette publique africaine a été souscrite auprès d’établissements financiers privés étrangers. L’État chinois possède, de son côté, 16 % de cette dette. Il rechigne à accepter les accords de reconfiguration des dettes décidés par le Club de Paris. Il exige souvent des concessions de la part des États africains avec la cession de ports, de voies ferrées ou d’aéroports. En 2020, le FMI a accordé 16 milliards de dollars de prêts, pour la plupart avec peu de conditions, pour aider les pays africains à répondre à la pandémie et à prévenir les problèmes de liquidité. La Banque mondiale a ajouté 10 milliards de dollars supplémentaires. Au sein du G20, plusieurs pays sont favorables à un programme de restructuration et d’annulation de la dette. Plusieurs États africains ne sont pas favorables à un plan d’annulation qui pénaliserait l’ensemble du continent, en risquant de détourner les investisseurs privés pour de nombreuses années.

Le FMI prédit que ce sera la grande région à croissance la plus lente cette année. Les États producteurs devraient néanmoins profiter de la reprise des cours. Le prix du baril de pétrole retrouve progressivement son niveau d’avant crise. Il n’en demeure pas moins que les États africains devront faire face à une réduction des flux de capitaux et à une moindre activité du secteur touristique pour plusieurs années. les tensions politiques et sociales en Afrique subsaharienne risquent, de ce fait, de se multiplier.