5 juillet 2014

Les paradoxes de la Russie

La croissance de la Russie pourrait être négative en 2014 ; le recul du PIB pourrait atteindre 1 %. La crise ukrainienne et le ralentissement de la demande des pays émergents et des pays européens en produits énergétiques pèsent sur l’activité du pays. La demande intérieure est également freinée par la hausse des taux d’intérêt.

La Russie doit faire face tout à la fois à des défis conjoncturels mais aussi à des problèmes structurels qui perdurent. Les problèmes conjoncturels sont liés, en premier lieu, à la crise en Ukraine. Celle-ci a provoqué une sortie massive de capitaux qui contribue à accélérer la dépréciation du rouble. Selon la Banque centrale de Russie (CBR) et de l’Institute of International Finance (IIF), les sorties nettes de capitaux se sont élevés à 51 milliards de dollars au premier trimestre 2014 contre une moyenne de 16 milliards de dollars en moyenne auparavant. Les entrées de capitaux non-résidents ont été divisées par trois. Les flux d’investissements directs d’origine étrangère ont baissé de moitié par rapport à la même période de l’année précédente et les entrées d’investissements de portefeuille se sont transformées en sorties nettes. Le Ministère de l’Économie estime que les sorties de capitaux devraient se ralentir dans les prochains mois. Sur l’année, elles devraient néanmoins atteindre 100 milliards d’euros soit 5 % du PIB.

La dépréciation du rouble et les goulets d’étranglement de l’économie russe provoquent une augmentation des prix qui atteint plus de 7 % contre 5 % espéré. Les autorités monétaires russes ont été contraintes de relever leurs taux d’intérêt avec comme conséquence une réduction du crédit.

Les problèmes structurels de la Russie entravent également la croissance. Le vieillissement de la population avec une population active en déclin constitue un indéniable frein pour la croissance. Le plein emploi provoque des tensions à la hausse sur les salaires. Le sous-investissement fragilise l’outil économique russe dont le taux d’utilisation est très élevé. L’investissement a été durement touché. Avec la crise ukrainienne, L’investissement fixe a diminué de 4 % en base annuelle au cours des cinq premiers mois de 2014. L’augmentation du coût de l’endettement et la raréfaction des capitaux étrangers accentuent la tendance baissière.

Malgré les problèmes conjoncturels et structurels auxquels est confrontée la Russie, le taux de croissance devrait redevenir positif en 2015 autour de 2 %. Les exportations énergétiques et de matières premières doperont la croissance. La banalisation de la crise ukrainienne devrait permettre le retour des investisseurs. Après une chute de plus de 5 % en 2014, l’investissement devrait, de ce fait, à nouveau progresser en 2015. Par ailleurs, le taux de chômage reste et restera faible à 5,7 % tout comme le déficit budgétaire, -0,7 % du PIB, en 2014. La dette publique s’élève à 13,4 % et la balance courante dégage toujours, en 2014, un excédent de 2,8 %du PIB. Malgré une petite baisse, les réserves de change dépassent 455 milliards de dollars. Elles étaient de 510 milliards de dollars en 2013. L’économie russe a les moyens de connaître une année noire. Le scénario se compliquerait que si les prix du gaz et du pétrole chutaient fortement. Or, nul n’a intérêt de lancer une guerre des prix même pas les Etats-Unis car les producteurs américains de gaz de schiste et de pétrole bitumineux ont besoin de cours élevés pour rentabiliser leurs investissements.